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17/12/2014

A neuf ans, fusillé. Balle aux prisonniers.

Un jour, on m'a fusillé.

Je me rappelle : nous étions trois, je crois, alignés dans la cour de l'école. C'était la récré.

Nous avions tous quelque chose. Lui, le "polak"; elle, la timorée; moi, le "moche" à cheveux longs "comme les filles".

Nous étions dos au mur. La maîtresse vénérait, semble-t-il, la balle aux prisonniers.

C'était à ce moment, vraisemblablement, l'heure de l'exécution. Ballon dans la gueule, sur le corps, criblés. Joyeuse meute.

Je ne sais pas combien de temps ça a duré. ça les a pris comme ça, en tout cas. Personne n'avait fait quoi que ce soit, pourtant. Haro sur les canards boiteux, les non conformes, avec la bénédiction des instances raisonnables. ça leur apprendra. C'est pour leur bien.

ça n'a pas duré bien longtemps, je crois. Allez savoir. Je m'en souviens pourtant presque quarante ans plus tard.

Trop rêveur, il fallait le dégourdir, le réveiller. C'est pourtant simple.

Des épisodes de ce style, j'en ai connu d'autres- pas aussi emblématiques, peut-être. De drôles de tours.

La brave femme avait des valeurs; des valeurs que mes parents, singuliers, immatures, ne semblaient pas partager. Ils voyaient les choses sous un autre angle. Pas le bon.

Elle faisait une fixette sur les commémorations. Le monument aux morts.

Moi aussi, madame, j'aime les morts. Je pense à eux. J'aime aussi la nuit, les sépulcres, les temples. Vous voyez. J'aurais du vous en parler.

En tous cas, moi le fusillé, je n'ai rien dit. Bizarre? Non, ça semblait tellement normal.

Je faisais parti de la caste des "intouchables" en quelque sorte.

La faculté d'adaptation des enfants est parfois proprement effrayante.

11:08 Écrit par Neothene dans Epines | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : souvenirs, enfance, école

Désertion

Défile la vie. Un pas entraînant l'autre. Tu rêves à ta disparition. Au hasard d'un train, pour un temps indéterminé.

Un pas entraînant l'autre.

Désertion du guerrier.

Comme un nuage de fumée, te dissiper.

Un scène après l'autre, avance, avance sur les planches de cette pièce où tout est joué d'avance.

Pourtant, ce type seul, petit, chétif, qui traîne la patte à qui parle-t-il? Seul, seul, seul.

Un pas après l'autre, tu t'éprouves. Pas assez. Courir jusqu'à te disloquer.

ça passera. Tu reviendras, inévitablement, bien sagement, gentiment. Auprès de l'âtre. Te coucher paisible, paisible, bon chien, mais ça ne dormira pas vraiment.

Tristesse ou inquiétude que tu ne veux pas susciter. Belle âme...?

Peut-être ne t'es-tu jamais aimé assez pour t'écouter; et peut-être t'aimes-tu trop pour te risquer.

Chacun son récit, sa version.

10:14 Écrit par Neothene dans Epines, Méditations | Lien permanent | Commentaires (0)

11/12/2014

Ghost in the machine

Sur l’écran, le fantôme et ses promesses. De ton côté, la pesante quotidienneté. Parfum de produits ménagers, fatigue,  refrains prosaïques et baisers expédiés.

Le quotidien à terrasser.

Combat inégal.

Les parfums lointains, les regrets, la petite musique putassière du non advenu.

Les séduisants possibles, du côté d’un ailleurs qui se fait désirer.

Lutter contre les chimères bien balancées qui s’habillent de passé ?  Les combattre c’est leur donner corps.

Et ne pas lutter contre elles ?

Tu les voies se déployer, gentiment se vautrer, s’installer.

Que faire alors ?

Attendre que la flagrance se dissipe, le parfum s’évente.

 

Immobile 

le guerrier en statue pétrifié

gisant

le glaive à la main

Granitique templier

Accablé d’intempéries, de feuilles mortes jetées à plein vent

Un baiser timide, une caresse se risquent sur la pierre.

15:13 Écrit par Neothene dans Epines, Méditations | Lien permanent | Commentaires (0)