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10/04/2013

Le soir. Kadikoy.

Nous sommes retournés là-bas. Au sein de cette modernité détendue et sympathique à quinze minutes en bac. Des bars, des livres, des disques, des gens souriants et vivants. Puis la nuit s'était imposée nous rappelant l'échéance ; le bateau à ne pas manquer. A quelle heure ultime nous n'en savions plus rien, tant nous étions tout à notre plaisir et nos rêveries, nos paroles caressant je ne sais plus quel projet, quelle gentille chimère. Une autre vie, d'autres quotidiens. L'horizon se déployait dans nos têtes, et l'un accusait l'autre de trop rêver pour, à son tour, mieux rêver encore. Qui sait?

Alors nous nous sommes un peu agités, pressés en une très lointaine pantomime parisienne. A la station des gars couraient pour le choper ce bac. Stoppés soudain par les paroles de l'agent. Trop tard pour celui-là. Dans une heure le prochain.

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En attendant, nous avons errés tranquillement à proximité. Les petites boutiques ambulantes proposant boissons, cigarettes, journaux, bectance à volonté. Et au milieu, lui avec son matériel de rien du tout et sa voix bourrée d'âme qui ressuscitait de vieux classiques inconnus de nous seulement ; ils étaient tous là, jeunes, vieux, enfants,  à réclamer gentiment tel ou tel classique, et lui les exhaussait et s'exécutait impeccablement comme s'il se fut agi de ces propres chansons, de ses créations, de ses bébés, mille et mille fois interprétées. Les gens l'accompagnaient de leur voix. Communion. Ame collective. Un moment de magie pure. Toi, ma belle, les larmes aux yeux. Comme tu sais vivre. Comme tu sais sentir, éprouver.

Et puis l'heure est venue de nous laisser emporter dans la nuit vers notre rive, la tête pleine d'images, le coeur plein à craquer.

22:52 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : turquie, istanbul, rive asiatique, kadikoy

25/03/2013

Merhaba !

 

Hello – Special price for you, my friend.  Tu prends cela comme un affront. Tu n’es anglais ni américain, ni allemand. Pas un touriste. Tu ne te déplaces pas dans une bulle hermétique pour choper tel ou tel cliché et détenir ta collection de cartes postales faites maison. Tu veux sentir ici  la vibration, l’âme. Tu veux faire corps avec autre chose. La modification par l’autre, l’altération de ce qui s’appesantit trop en toi. Le décentrement. Voilà entre autre ce que tu cherches.  Alors les gars laissez votre anglais, please. Je ne me reconnais pas là-dedans. Parlez-moi comme si j’étais l’un des vôtres, même si je n’y comprends rien ou pas grand chose. Faites-moi ce plaisir, cet honneur, oubliez le touriste et l’occidental, et faites résonner en moi l’autre que je suis aussi.

15:48 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : istanbul, turquie, voyage

17/03/2013

Narguilé, bourrasques et un rien de tristesse

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Sous notre abri, installés dans un salon en plein air habillé de tapis, nous restons blottis l'un contre l'autre comme deux enfants, ce que nous sommes.

Autour il fait froid, et les bourrasques agitent la bâche qui nous protège du mieux qu'elle peut de l'ondée glacée. La flamme de la petite bougie ne subsistera pas bien longtemps. Toi avec un thé, et moi qui fume méthodiquement et te passe parfois le relais. Effluves de pomme et de tabac. La tête te tourne parce que tu aspires trop fort, comme d'habitude. Cela nous fait rire autant que la situation en elle-même.

Nous ne sommes pressés par rien et pourtant...

Quand les jeunes gens s'installent à nos côtés, nous leur adressons un sourire mais restons avares de paroles. Non pas qu'ils nous dérangent - eux quatre, trois garçons, une fille, la vingtaine, des locaux sympathiques et discrets -, mais nous nous sentons un peu comme en sursis. Demain, nous serons arrachés à ce sol - tu trembleras, tu saisiras ma main -, et pour quelques heures nous constaterons une nouvelle fois qu'au sein des nuages rien ne se cache. Après nous prendrons acte : le connu, bien trop connu. Pas d'autre choix... Alors  à quoi bon lier rien qu'un peu? A quoi bon se livrer? Quelque chose en nous s'est déjà un peu dérobé. Ce qui nous reste, nous le gardons précieusement, pour nous deux seulement, et tentons d'étirer, et d'étirer encore, l'instant.

23:55 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : turquie, istanbul, voyage

22/02/2013

Maroc - 6 mars (Fès 8ème jour)

A l'instant où j'écris ces lignes, notre avion en partance de Fès et à destination de Paris vient de décoller avec une demi-heure de retard. Je viens de contempler par le hublot la nébuleuse gigantesque que forment réunies les lumières de Fès. Vue magnifique. Vue grandiose. L'avion remue un peu. Zone de perturbation. I. Vient de lacher ma main tenue serrée tout le décollage. Au moment de monter à bord, j'ai regardé une dernière fois le petit aéroport tout illuminé. Un seul et unique avion alentour : le notre. Et je sens toute la fatigue s'abattre sur moi d'un seul coup. Beaucoup d'au revoir en une seule journée. Fès devenait peu à peu mon chez-moi à moi aussi, avec mes habitudes, mes connaissances, mes lieux de repli. Tout cela, il a fallu le quitter pour vivre un nouveau dépaysement : le retour en région parisienne. Nos villes grises et tristes où l'agitation prévaut sur la vitalité. Attente de la suite et légère mélancolie.

Ce matin, à 9h00, le lever fut un peu difficile. Un tour sur la terrasse habituelle pour la vue, mais petit déjeuner sur celle qui se trouve plus bas, à hauteur de notre chambre. Nous nous enlaçons et je donne un baiser à ma chérie. Ce geste est suivi de lointains applaudissements : quelques ouvriers, sur une terrasse, auront été distraits de leur travail de réfexion.

Je descends voir en cuisine pour prévenir que nous sommes levés. S. est affairée dans la cuisine et seule. Sa. L'a laissé pour accueillir de nouveaux touristes. Je lui propose de l'aider en emportant le lourd plateau en haut, mais elle n'a pas terminé de préparer. Nous discutons un peu. Elle n'a jamais de vacances, seulement quelques jours de temps en temps quand les pensionnaires manquent, ce qui arrive rarement. Elle ne veut pas se marier pour “être libre, et ne pas se retrouver cloîtrée à la maison à faire la cuisine”. Elle aime Tanger et Tetuan et me conseille aussi Marrakech. Je la laisse terminer tranquillement. Je repasserai dans dix minutes prendre le plateau. Nous restons avec I. Tout à notre contemplation. C'est A. qui finira par surgir avec notre plateau. Nous évoquons notre départ ; il préfère nous laisser profiter du petit déjeuner.

Vient ensuite le moment de la préparation des bagages. Tout doit rentrer. Victorieux, nous les redescendons à la cuisine où nous retrouvons toute l'équipe. A. nous précise la somme à règler et nous commande à l'avance le taxi qui nous mènera à l'aéroport. Nous convenons d'une heure pour nous retrouver afin de règler les derniers détails. Au revoir à S. que nous ne reverrons pas car son service s'achève à 15h30.

Remontons par le chemin habituel. Juste à côté de notre résidence j'achète un chapelet que j'avais repéré depuis un jour ou deux sur un tout petit stand. Une fois mon achat effectué, le marchand me propose de m'enduire les mains d'une eau “porte-bonheur”. Plus haut, je me procure un foulard noir.

Au Batha, nous prenons un taxi pour nous rendre dans la nouvelle ville. Nous arrivons à midi pour revoir une dernière fois les anciens collègues d'I. Mais deux des personnes que nous espérions revoir sont parties déjeuner ; nous avons mal calculé notre coup. Nous décidons de passer par la poste afin de nous occuper des quelques cartes postales que nous comptons envoyer, et de retirer l'argent pour régler notre chambre. Le compte d'I. est une fois de plus bloqué et je dois tout retirer sur le mien.

Nous nous installons ensuite à la terrasse d'un grand café où nous nous étions rendus les jours précédents. Un peu stressée, I. S'interroge sur ces histoires de compte en banque. Elle finit par appeler sa banque en France pour obtenir des explications. J'appelle quant à moi J. pour qu'elle me donne les quelques adresses qui nous manquent pour envoyer les cartes. Puis nous allons déjeuner.

Vers 14h00, nous allons retrouvons le collègue d'I. Qu'elle n'a pas encore eu l'occasion de revoir. H. est un homme d'une cinquantaine d'années sympathique et posé. Nous allons tous les trois prendre un café ensemble.

Une heure plus tard environ, nous nous quittons. Nous n'aurons pas le temps de repasser saluer les autres. Taxi et descente éclair jusqu'à la maison d'hôte. En chemin nous disons au revoir à quelques têtes connues que nous avons la chance de croiser. Après que j'ai sonné, A. descend nous ouvrir et me restitue mes clefs ; je les avais laissées par distraction accrochées à celle de notre chambre. Je règle la note, et A. nous offre le thé accompagné de quelques pâtisseries. Nous prenons quelques photos et laisser une petite enveloppe pour l'équipe. Au revoir à A. en bas, et à un des petits fumeurs. S. nous emmène à pied jusqu'au taxi. Le véhicule passera par la zone industrielle, par Narjis et devant le grand centre commercial Marjane.

Nous arrivons à 17h00 à l'aéroport. Timing parfait. Nous faisons procéder à l'enregistrement des bagages puis passons dans le hall pour y attendre l'embarquement. Je regarde les personnes qui attendent avec nous. Un jeune gars à l'allure de boxeur lit le dernier T. ramadan sur les révolutions arabes ; un monsieur marocain d'une soixantaine d'années est quant à lui plongé dans la lecture d'un roman de Stephen King. En patientant, I. Et moi évoquons notre grande fatigue et le stress lié aux voyages en avion. Observons alentour. Deux ou trois bébés se manifestent autour de nous etn ous pensons à notre fille que nous allons bientôt retrouver. La nuit tombe peu à peu sur le petit aéroport. Une demie heure après l'heure prévue, une voix annonce l'embarquement. Nous attendons que la file d'attente aie diminué avant de nous lever. Nous sortons et marchons tranquillement vers l'avion. Nuit pleine d'étoiles scintillantes. Dans l'avion nous discutons avec notre voisin d'origine marocaine et français. C'est un garçon de notre âge ; il vient de monter une petite pizzeria à Tanger et envisage d'y retourner pour s'y installer. Il nous demande nos professions respectives, ce que nous avons pensé du Maroc et où nous habitons. Nous sommes en fait presque voisins. Il habite la commune voisine de la notre. Petite discussion sur la politique et la religion ; nous demande ce que nous pensons de la culture musulmane. Une fois prise notre collation, je reprends mes notes. I. se repose contre moi et éclate une ou deux fois de rire en suivant un épisode de Mr Bean qui passe sur les écrans. Puis zone de turbulence. I. Pour se détendre écoute son mp3. Je vais quand à moi tenter de dormir.

Nous approchons maintenant peu à peu d'Orly. Ce ne sont maintenant plus des nébuleuses mais de petites constellations bien ordonnées reliées par de fins filaments de lumière. L'atterrissage se fait en douceur. Nous avons une heure de retard et d'après notre voisin nous l'avons échappé belle. Cinq ou dix minutes plus tard, l'aéroport fermait et nous étions bons pour atterrir à Roissy.

Cheminons lentement jusqu'au petit bus qui nous mène de l'avion à l'aéroport, puis attente patiente des bagages et de leur défilé. Pas mal de gens sont agglutinés charriots en main autour des tapis roulants. Une dame marocaine plaisante avec nous. Elle a emmené ses parents âgés au Maroc et les a pris en charge pendant une semaine ; elle est épuisée.

Une fois les babages récupérés nous attrapons un taxi. Un homme noir très grand, placide et coiffé d'une casquette à l'ancienne nous ramène jusqu'à chez nous. Arrivés à proximité de chez nous, nous nous arrêtons à un retrait pour régler la taxi. C'est I. Qui s'en charge cette fois, car je ne parviens pas à retirer d'argent ; j'en ai trop retiré à Fès pour règler notre chambre. Sur la place, un jeune gars en survét' appuyé contre une voiture s'emmerde. Pas un rat dans les rues à cette heure. Légère brume.

A peine rentrés chez nous, nous vérifions si tout est ok dans l'appart et vidons directement les bagages tout en préparant un nouveau sac pour le périple de demain, car nous repartirons chercher notre fille en province. Je ne peux m'empêcher malgré l'heure de déballer les objets achetés au Maroc et de les ranger, de remplir les deux poufs avec les vêtements de bébé de ma fille. Il fait froid dans l'appartement.

Nous nous résignons à nous coucher. J'ai hâte d'être au lendemain. Je n'ai pas envie de replonger dans le morne quotidien de nos existences franciliennes, et dans cet univers d'images agressives et de slogans raccoleurs, d'appels constants au désir et de mise en scène narcissique de soi. Tout ce cirque est-il le prix à payer pour tout ce confort et cette liberté? La question est, je crois, mal posée.

10:21 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0)

21/08/2012

Maroc 5 mars - Fès (7ème journée)

Lever à 9h00. Nous projetons de nous occuper aujourd'hui de l'achat des cadeaux. Auparavant, il me faut me rendre chez le barbier.Vers 11h00, je m'installe sur le fauteuil. Le monsieur moustachu se saisit de son rasoir et se lance avec grande concentration dans son ouvrage. Un fin rideau vert cache la scène aux passants. Autour de moi, jeu de miroirs. I. est installée sur l'autre fauteuil et attend patiemment tout en prenant quelques photos de la scène après avoir, bien entendu, demandé au monsieur s'il n'y voyait pas d'inconvénient. Au départ, le fait de rester inerte à attendre que quelqu'un fasse les choses à ma place me procure un sentiment d'étrangeté. Je dois préciser que je n'ai jamais mis les pieds chez un coiffeur. Pourtant ici, la chose me paraît plus envisageable, plus naturelle et relevant des petits rites de la vie quotidienne. Vient le tour de ma barbe. Arsenal de tondeuses, de rasoirs.Taille parfaite. Pendant ce temps, la tête penchée en arrière, j'ai tout loisir de jeter un oeil sur le diplôme suspendu au dessus de la glace qui me fait face. Il comporte la photo du barbier. Moustache plus fournie, cheveux plus longs et foncés. La date : il y a quinze ans.

Une fois sortis, nous commençons nos achats. Périple au travers de différents quartiers de la médina. De temps à autres, nous saluons une tête connue : le petit gars du restaurant de tajines ; le petit gars à casquette qui zone toujours les mains enfoncées dans les poches. Une fois, une bonne partie de la mission achats menée à bien, nous repassons par la chambre pour y déposer nos acquisitions et repartons aussi sec en quête du restaurant de cuisine familiale repéré dans notre guide.

A ma grande surprise, car dans la médina le chemin ne me semblait pas dénué de difficultés, nous trouvons relativement facilement, après avoir parcouru des ruelles enfumées. C'est justement dans l'une d'elle que se trouve notre restaurant. Une énorme fumée noire s'échappe de l'entrée. A l'intérieur, des serveuses aux hijabs roses bien ajusté s'affairent tandis qu'un vieux homme au visage de touareg et au turban orange arpente les lieux attentif à l'évolution des repas de chaque tablée. Très amical et énergique, il nous pousse jusqu'aux cuisines où, à l'aide 'une cuillère en bois, il nous fait goûter quatre ou cinq plats différents tandis que deux dames qui nous saluent rapidement s'activent aux marmites. Il nous installe ensuite sur une petite table sur laquelle on nous dépose du pain et de petites entrées. Sur le mur blanc qui me fait face, en hauteur, j'aperçois deux photos encadrées. Sur chacune, le monsieur au turban orange une coupe dans les mains et entouré vraisemblablement de membres de sa famille tout sourire. Lui arbohre sur ces clichés un air plutôt rêveur et un peu mélancolique.

Les tajines qui nous sont servis sont délicieux. Le monsieur au turban vient régulièrement nous servir du thé. A la table à côté trois personnes s'installent. Ils discutent en anglais, mais l'un d'eux s'adresse amicalement au patron en français ; de toute évidence, c'est un habitué, et monsieur B., le monsieur à turban, lui apporte une théiére en argent qu'il examine et devant laquelle il semble s'émerveiller. Elle a probablement été extraite du bric-à-brac d'objets qui encombre la table derrière moi. Des pendules, des théiéres, des sujets en bronze, etc. Les trois personnes de la table à côté ont choisi des tajines de poissons, et trois grandes assiettes remplies en dôme leur sont servies. Mine authentiquement effrayée du plus malingre des trois.

Une fois notre festin terminé, monsieur B. nous apporte en supplément deux trois bricoles qu'il tient absolument à nous faire goûter, plus du thé, plus du pain... Je pense que nous allons probablement finir par exploser. Un festin pour une somme dérisoire. Nous remercions, échangeons avec monsieur B. quelques plaisanteries, puis nous sortons avant de nous perdre un peu dans la médina.

Les écoles coraniques que nous envisagions de visiter sont fermées, de même que l'Institut français du Batha. Nous décidons d'aller prendre le thé quelque part et nous mettons à chercher une adresse dans le guide.A côté de nous, la porte d'un restaurant s'ouvre soudain. Le type nous annonce que si nous voulions entrer le restaurant n'est pas encore ouvert. Nous lui répondons que nous avons déjà mangé, de toute façon. Aussi sec, il nous demande si nous avons apprécié notre repas. Notre réponse positive lui paraît manquer d'enthousiasme ; ça ne devait pas être bien terrible, et venez donc visiter mon magnifique restaurant dans lequel nous ne servirons que des choses fraiches et pas du surgelé. Vous comprenez ils servent tous ça du surgelé, et même dans les plus chers vous savez!

Bien que le propriétaire des lieux nous soit prodigieusement antipathique nous en profitons pour visiter la superbe demeure marocaine. A la suffisance et au mépris affiché pour les gens de sa profession, s'ajoute à ce personnage une allure à l'image du reste. Petit et très bedonnant, allure de niçois parvenu ; un étrange casque de cheveux teints en noir corbeau et très gonflés surpombe un visage d'une soixantaine d'années aux yeux globuleux.

Nous continuons notre périple dans la médina en médisant à plaisir sur le personnage. Nous cherchons une porte quelconque pour attraper un taxi et retourner aux mérinides prendre le thé. Un petit garçon portant une besace sur le point de craquer définitivement sous le poids des livres et cahiers nous salue et nous demande ce que nous cherchons. Il nous mène dans la direction et en chemin nous annonce pour info son tarif. Nous sourions de son culot et le plaisantons gentiment.

Nous finissons par trouver la sortie et nous installons sur un banc dans l'attente d'un taxi. Une femme d'une trentaine d'années s'installe à côté de nous pour profiter du soleil. En plus de ses lunettes de soleil, elle porte par dessus son hijab une visiaire de casquette. Genre de fantaisies vestimentaires insolite en France. Ici le hijab est quelque chose d'anodin, un accessoire presque comme les autres et n'a rien d'ostentatoire. La jeune femme est par ailleurs vêtue d'une grosse veste de cuir assez masculine et porte des jeans. En attendant le taxi, nous entamons la conversation avec elle. Elle nous dit connaître et aimer la France ; elle envisage d'y retourner prochainement. Nous parlons de la crise, des présidentielles (ah ! votre Sarkozy!), et épisodiquement nous plaisantons à propos des taxis qui passent tous plus bomdés les uns que les autres à tel point que nous désespérons d'en trouver jamais un pour nous emmener. Enfin nous finissons par embarquer tous les trois. Arrivée à destination, la jeune femme nous salue et nous souhaite une bonne soirée ; elle me fait vraiment penser à H. notre amie syrienne.

Aux Mérinides, nous prenons le thé tranquillement. Panorama toujours aussi avantageux. Belle lumière de fin d'après-midi.

Non loin de nous, un type assez classe accompagné d'une fille beaucoup plus jeune et d'apparence assez vulgaire. Sa maîtresse probablement. En contrebas, un homme d'une soixantaine d'année s'avance lentement vers une piscine accompagné de sa femme. Il fait deux longueurs et sort. Sa femme le sèche à l'aide d'une serviette et ils repartent d'où ils sont venus. Fin du cérémonial. A la table à côté, l'évasion hors de la routine conjugale. En contrebas, la routine conjugale sanctuarisée.

Après le thé, nous repartons à pieds en direction de la médina ce qui nous donne l'occasion d'une belle promenade. Petite brise. La température baisse progressivement. Beaucoup de personnnes remontent de la médina. La nuit qui tombe peu à peu...

Nous refaisons un tour sur la place de la veille avec tout son bric-à-brac d'objets et de chaussures. Nous repassons par le marché où je ne peux m'empêcher de donner une fois de plus quelques dirhams à un petit qui nous sollicite. I. me plaisante : "Le bienfaiteur de Fès !... Il est temps qu'on parte!". Remontons dans le bar-restaurant de la veille boire un milkshake et profiter de l'endroit. Installés sur la banquette nous regardons quelques photos prises durant la journée, et d'autres de notre fille. Non loin de nous quelques jeunes couples de marocains. Se font écouter du rock sur leur Iphone. En même temps s'élève l'appel à la prière.

Nous décidons de rentrer. En chemin, nous achetons une crêpe “mille trous” qui fera largement office de repas du soir compte tenu de ce que nous avons avalé au cours de cette journée. Pendant que nous nous livrons à la transaction un cireur de chaussures me propose ses services. J'accepte et à ma grande surprise il s'installe aussitôt à l'endroit où nous nous trouvons pour commencer son labeur. Je suis un peu géné par la situation. Des serveurs du restaurant à côté observent la scène et semblent la trouver fort amusante. I. ne peux s'empêcher de rire aussi. Un serveur nous fait comprendre au moyen de quelques signes que le cireur fait du bon boulot. “You have new shoes now!”. Lorsqu'il a terminé, je donne un peu plus au cireur que ce qu'il me réclame. Je ne peux m'empêcher d'éprouver un sentiment de honte. Voir cet homme à mes pieds s'activer sous les rires pour gagner une misère... nous repus, en vacances, en voyage. Je m'imagine à sa place avec mon regard de touriste. Mais que vaut ce regard biaisé? Il fait son métier et c'est tout.

Redescendons jusqu'à notre chambre. Après un coup de téléphone à notre fille, nous discutons de la journée du lendemain, la dernière, et de comment organiser notre départ.

 

00:11 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0)

16/08/2012

Maroc 4 mars - Fès (6ème journée)

 

Lever à 09h00. I. légèrement malade depuis la veille au soir. Nous prenons notre petit déjeuner sur la terrasse sous un beau soleil. Je trouve le mail de C. sur le portable et lui téléphone aussitôt. Il se trouve à 1000 km de nous dans le sud du pays. Echange d'impressions, de plaisanteries plus ou moins bien trouvées, plus ou moins fines comme souvent quand nous discutons tous les deux.

Aujourd'hui, nous restons pas mal de temps dans notre chambre et à profiter de la terrasse. I. en a particulièrement besoin, et cette pause me fait le plus grand bien à moi aussi. Je passe en revue les quelques livres en anglais mis à disposition dans notre chambre : le « récit d'une convertie », une biographie du prophète, un livre sur le Maroc.

Nous ne mettrons le nez dehors que vers13h45 pour essayer la deuxième adresse qu'on nous a conseillée à notre arrivée. Il s'agit d'une sorte de bar-restaurant, près de la Porte bleue, sur plusieurs étages et pourvu de quelques terrasses. L'établissement propose un carte mélangeant cuisine marocaine et nourriture plus « standards ». Installés tout en haut sur des banquettes à l'ombre nous profitons de la vue et de l'ambiance très relax. Ici, les touristes se succèdent. Personnes d'Europe du nord, américains, etc. Mais aussi de jeunes marocains « émancipés » et pas trop désargentés.

Nous sortons, passons la Porte Bleue. Sur une grande place, se tient un marché de bric-à-brac. Des gens proposent divers objets posés à même le sol. Un peu plus loin, des attroupements. Nous nous rapprochons d'un cercle de personnes, principalement de jeunes hommes. Au milieu du cercle, trois personnages : deux hommes d'une soixantaine d'années habillés en djellaba sont arbitrés par un type portant grosse moustache et lunettes noires. Echange de piécettes entre les deux principaux protagonistes au verbe haut. Discussion des deux avec l'arbitre. Puis chacun rivalise à nouveau d'éloquence ; nous ne comprenons évidemment pas grand chose. Le spectacle ne lévera malheureusement jamais son mystère pour nous car personne ne parle français à proximité et ne peut donc nous expliquer de quoi il retourne. I. penche pour un performance de marabouts. Possible. Probable.

Plus loin, autre attroupement et autre spectacle « incompréhensible ». Nous n'attendrons pas cette fois que le mystère s'éclaircissent, nous le snobons en acceptant d'emblée notre incapacité à comprendre ce que nous voyons.

Un peu plus loin, un vieil homme joue du houd et chante dans un micro relié à une sono portative bricolée avec les moyens du bord.

Plus loin encore, des gens armés de cannes à pêche, dont les lignes se terminent par un petit anneau, rivalisent d'habileté pour « ferrer » des bouteilles de soda.

Après avoir tiré un peu d'argent, nous nous réintroduisons dans la médina. Un jeune gars tente de nous proposer ses services comme guide mais nous lui expliquons que nous avons déjà vu la veille ce qu'il se propose de nous faire découvrir. Déception. Une fois de retour à la maison d'hôte, I. s'occupe de confirmer les réservations pour les billets retour.

Sur la terrasse, nous nous reposons et regardons la nuit tomber lentement. Un petit coup de téléphone à notre fille. Prononcés par une toute petite voix les mots magiques : « Allo papa ?!!! ».

Nous décidons de ressortir prendre un verre à l'hôtel des Mérinides où nous nous étions rendu avec K. Remontons jusqu'à la porte et au passage je demande à un petit barbier que j'avais repéré ses horaires pour y passer le lendemain et me faire raser la tête. Nous prenons par le Batha et attrapons un taxi. Le type très sympa et parlant très bien français, nous parle un peu de lui et de son métier. Nous prenons un autre passager en route. Arrivés en haut nous prenons son téléphone pour qu'il revienne nous chercher plus tard.

Sur la terrasse, nous jouissons d'une vue imprenable sur toute la médina de nuit en sirotant des pastis. Vers 21h45, nous décidons de rentrer et appelons notre taxi qui nous ramène très rapidement au Batha. Nous redescendons ensuite tranquillement à pied. Sur le chemin, nous croisons le petit gars qui nous avait guidé contre notre grès deux jours auparavant jusqu'au restaurant. Il nous tient compagnie un bout du chemin avant de tourner pour rentrer chez lui après nous avoir salué. Il ne nous demandera rien. Nous faisons parti du décor désormais. En bas, nous nous engageons dans la minuscule ruelle sombre qui nous mène à notre porte. Nous distinguons les habituels jeunes gars que nous saluons avant de rentrer. Dans la chambre, nous grignotons un peu de pain et de vache-qui-rit, plus quelques pâtisseries orientales. Je prends ces notes rapides pendant qu'I. potasse le guide. Il est tard maintenant et je commence à piquer du nez.

 

11:35 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0)

15/07/2012

Maroc 3 mars - Fès (5ème journée)

Aujourd'hui quand nous nous levons à 8H30, nous sommes déjà réveillés depuis un moment. Comme la veille, nous prenons tranquillement le petit déjeuner sur la terrasse. Nous nous sentons néanmoins beaucoup plus détendus que la veille. Nous avons décidé de nous rendre dans le quartier juif. A 11h, nous empruntons donc la talas seghara jusqu'à la Porte Bleue. Ce trajet ne fait que confirmer l'impression que nous avions déjà éprouvée la veille : cet itinéraire est nettement plus calme que le premier que nous avions choisi, et ici presque personne ne nous alpague. Nous pouvons ainsi flâner tranquillement et observer ce qui nous entoure. Arrivés en haut, nous prenons la direction qui nous paraît la plus à même de nous mener au quartier juif. Mais nous constatons bien vite que la périphérie immédiate de la médina ne s'apprivoise pas plus facilement que l'intérieur de la médina elle-même. Nous errons. Jaran Sbin, le grand jardin avec ses grands palmiers, ses bancs discrets pour amoureux, ses grappes de gars désœuvrés, et ses familles, constitue pour nous une pause agréable. Nous continuons ensuite un peu au hasard, empruntant toutes sortes de ruelles improbables et cradingues. Un gars fait des tours avec une vieille mobylette ; un autre expose à même le sol des bouts de ferraille et des pièces de vieilles machines ; des gosses tapent dans un ballon au milieu d’éboulis et de tas de détritus. Nous apercevons des arrêts de bus. I. pense que nous ne sommes pas très loin du quartier juif. Nous attrapons un taxi qui nous y mène très rapidement. Sur place, de minuscules bars avec leurs chaises en plastique ; de petits étalages de fruits , des boutiques de bijoux artisanaux et de bijoux en or, ou pendent de grandes chaînes du même métal ; des stands pourvus d'une quinzaine de têtes toutes semblables chacune coiffée d'un hijab différent.

Une fois notre tour terminé, nous retournons à la Porte Bleue en taxi et nous mettons en quête d'un endroit où déjeuner rapidement avant que n'arrive le moment de rejoindre K.. Pas loin de l'entrée de la médina, nous tentons de trouver une des adresses conseillées par A., mais nous repérons un petit boui-boui marocain qui propose du poisson frit, des haricots, des frites et des salades. Dans une minuscule salle blanche très haute de plafond et bondée, nous nous installons à une des trois grandes tablées. Assis sur de grands bancs, chacun ingurgite avec enthousiasme le contenu de diverses petites assiettes. Nos voisins nous glissent parfois deux trois mots en arabe et en français. Une dame nous explique de quelle manière manger les petits poissons qu'on nous a servis. Un monsieur comment dire telle ou telle chose, etc. Nous ressortons ravis et rassasiés après avoir payé la note dérisoire au maître des lieux qui, aidé de deux autres personnes, fonctionne comme s'il était pourvu de plusieurs paires de bras.

Nous redescendons par notre nouvel itinéraire fétiche pour repasser par notre chambre avant de retrouver K..

Une demie heure plus tard, à peine engagés dans le "grande descente" nous apercevons K. qui nous fait signe. Il nous demande ce que nous avons vu jusqu'à présent de la médina, et nous invite à le suivre. Notre périple durera deux heures. K. nous fait passer par le pont des cordonniers, la célèbre place des dinandiers où nous les apercevons affairés, frappant d'un geste sûr et inlassable leurs métaux. Nous passons par les ruelles dédiées à la tannerie. Un peu plus loin, des marchands mettent au enchère leurs peaux de mouton. Un jeune gars propose à K. de nous emmener voir les teinturiers. Après nous avoir montrer le site avec ses énormes cuves dans lesquelles pataugent jambes et pieds nus les teinturiers, les pantalons remontés jusqu'en haut des cuisses, il nous fait passer par de petits escaliers, et nous mène en hauteur où nous bénéficions cette fois d'une vue imprenable sur le site. Nous pouvons apercevoir les différents secteurs de la teinturerie comme les cuves dédiées à la chaux, mais nous ne parvenons pas à voir les cuves dédiées aux crottes de pigeons. Quel dommage! Chaque cuve est dédiée à une teinture, laquelle est obtenue à partir d'un produit naturel, nous explique le garçon. I. amusée me montre, plus loin, un troupeau de parfaits touristes installés en terrasse armés d'appareils photos et occupés à mitrailler les cuves. Elle m'explique qu'on leur donne souvent un brin de menthe à renifler durant la visite afin que leur "délicat odorat" soit épargné et qu'ils ne soient pas incommodés par l'odeur de la teinturerie pourtant tout à fait supportable. Le monde entier n'est pas encore aseptisé, et la vie dans certaines contrées, au travers de ses différentes manifestations, se donne encore à percevoir sans filtre et désodorisant...

 

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K. donne un peu d'argent au jeune gars pour le remercier. Un peu plus loin, il achète un petit objet artisanal sur un stand et le confie à I. afin qu'à notre retour, elle l'offre de sa part à sa maman.

Nous verrons encore différentes choses : la succession infini de stands réservés aux babouches, aux tissus, aux sacoches, aux caftans, à la vaisselle en métal, etc. Des mètres et des mètres d'objets magnifiques et ouvragés.

Nous passerons aussi devant le mausolée d'un grand saint de l'islam vénéré en Afrique noire, dont ma mémoire n'a malheureusement pas retenu le nom, mais dont le sépulcre fait office de lieu de pèlerinage pour les musulmans de cette région du monde.

Un peu plus loin, au détour d'une rue, à travers une porte laissée ouverte nous apercevons l'intérieur d'une minuscule salle de classe où, très studieuses, de petites filles suivent leur leçon.

A deux pas de notre maison d'hôte, nous nous arrêtons à une épicerie et achetons un assortiment de pâtisseries que nous dégusterons accompagnées d'un thé à la menthe avec K. sur la terrasse. Pendant qu'I. prépare le thé en bas, j'en profite pour faire visiter les lieux à K. Nous nous installons et la discussion s'engage sur l'histoire de l'Islam, ses différents courants, le Coran, la prière. Je questionne K. sur sa conception de la religion, sa manière de pratiquer, sa sensibilité sur la question.

Après cette pause bien agréable en sa compagnie, nous repartons en voiture, et il nous dépose sur ce qu'il appelle les "Champs Élysée" de Fès, car les dimensions de l'endroit, nous explique-t-il, sont directement inspirées de celles de la grande avenue parisienne.

Après avoir mille fois remercié K. pour la balade et pour sa gentillesse, nous redescendons tous deux la grande avenue. Je prends un certain nombre de photos car le lieu me semble vivant et agréable. Une légère brise rend aussi l'atmosphère très plaisante.

Un plus loin, des calèches stationnent le long du trottoir. Elles ressemblent à de grandes cages blanches pour oiseaux. Un cheval réfractaire rechigne à exécuter les ordres de son maître et se couche sur le flan ; deux aides prêtent main forte à ce dernier et tentent de redresser le cheval. Après cinq bonnes minutes, ils parviennent à venir à bout de l'animal, et son maître excédé finit par lui flageller l'arrière train de deux ou trois coups de trique.

Nous nous posons sur un banc avant de repartir à la recherche d'une épicerie afin d'y acheter de quoi manger pour le soir. Une fois, nos achats effectués - petits pains ronds, fromage à tartiner, jus d'orange, yaourt à boire, gâteaux - la fatigue nous tombe dessus et nous nous posons à la terrasse d'un café. I. est visiblement la seule femme installée à cette endroit. Tout autour, des hommes de différents âges et de différents milieux. Mais des hommes ; uniquement des hommes. Pendant que nous sirotons un café au lait - à savoir un expresso noyé dans du lait entier, ce qui donne au résultat quelque chose d'à la fois corsé et onctueux - boisson que j'apprécie particulièrement là-bas, des vendeurs à la sauvette défilent les uns après les autres, et arpentent la terrasse proposant aux consommateurs des cigarettes, des objets artisanaux, des lunettes de soleil, etc. Un cireur de chaussure passe aussi de temps à autre. De la débrouille pour survivre.

Nous partons en quête d'un taxi, mais sur la grande avenue, à cette heure, les taxis se font de toute évidence désirer. Autour de nous quelques groupes de deux trois personnes scrutent aussi le flot d'automobiles en quête d'un petit véhicule rouge aux banquettes libres. Nous finissons par en trouver un déjà pourvu d'un passager installé à l'avant qui se dirige dans la bonne direction. A l'intérieur du taxi, la discussion semble très animée entre le chauffeur et son premier passager. Derrière leur discussion, on peut entendre l'autoradio déverser le flot de paroles passionnées d'un commentateur de rencontres sportives. Quelle que soit la langue employée, on reconnaît immédiatement le débit et l'intonation si particulière et si caractéristique de ce type d'émission. Sans nul doute, il s'agit d'un match de foot. Le chauffeur et son passager discutent-ils de cela ou de politique? Seul un de ces deux sujets peut engendrer ce type d'échanges entre deux inconnus.

Nous rentrons à la maison d'hôte. Après avoir pris des nouvelles de notre fille par téléphone auprès de ses grands-parents et que j'ai fait un tour sur la terrasse, nous nous installons sur des poufs et prenons notre repas servi sur la petite table basse. I. me prête ensuite son portable afin que je consulte mes mails. C. m'a laissé un message et me demande de le rappeler rapidement. Il est de passage au Maroc depuis un mois. Ce grand distrait a bien sûr oublié de m'indiquer le numéro de téléphone auquel je dois le rappeler.

Je m'installe enfin sur le lit afin d'y reporter le détail de nos activités de la journée.

 

20:22 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maroc, maghreb, vacances, voyage, voyages

04/07/2012

Maroc 2 mars Fès - (4ème journée)

Après une nuit médiocre, je me réveille déprimé. J'ai entendu I. se lever et se rendre sur la terrasse au dessus de notre chambre. Je finis par aller la rejoindre et m'installer devant la table basse où l'on a servi un copieux et délicieux petit déjeuner. Nous échangeons nos impressions, et au cours de notre discussion nous décidons, malgré ce mauvais départ, de persévérer et de rester à Fez. J'essaie quant à moi de changer d'état d'esprit et de me défaire de mes impressions de la veille. Nous allons nous préparer et le manque d'intimité qu'offrent les toilettes de notre chambre - avec leurs simples portes saloon pour marquer la séparation d'avec le reste - nous donne l'occasion de plaisanter et de disserter sur les quelques avantages de ne plus être un "couple débutant". Nous décidons ensuite du programme de la journée.
Aujourd'hui, nous sommes vendredi et tout est fermé dans la médina. Nous pensons faire un tour à Raba dans les jours qui viennent car, d'après I., il s'agit d'une ville agréable en bord de mer, ce qui nous permettrait de respirer un peu en dehors de Fès, et surtout de la médina . Nous reste à savoir si la possibilité nous sera donner de partir de la chambre d'hôte deux jours avant la date prévue.
A peine sorti dans la médina mes bonnes dispositions du matin s'envolent : nous sommes harcelés tous les deux mètres, des jeunes semblent se payer notre tête et affichent pour certains une attitude que nous jugeons hostile. Une fois parvenus en dehors de la médina, nous nous promettons de ne pas rester une nuit de plus.
Dans la ville nouvelle, nous nous détendons peu à peu. Nous marquons une pause à la terrasse d'un petit café et songeons à un endroit où déjeuner. I. pense à quelques adresses qu'elle fréquentait. Nous mangeons vite fait dans l'une d'elle : un petit snack pour locaux proposant un petit menu copieux et pas cher.
Nous rejoignons ensuite les anciens collègues d'I.. Attendons en particulier K. qu'I. n'a pas eu l'occasion de voir la veille et qui a été mis au courant de notre passage. I. profite de notre passage dans les bureaux pour envoyer un mail à la propriétaire de notre chambre d'hôte afin de trouver un arrangement en vue de notre départ anticipé.
K. a écourté ses rendez-vous pour nous retrouver et nous le voyons arrivé plus tôt que prévu. Il nous invite à prendre un café pas loin et discute avec nous un bon moment. Il finit par nous proposer de jouer les guides demain dans la médina afin de nous la faire découvrir d'une autre façon, mais nous nous trouvons alors dans une telle disposition d'esprit que nous hésitons à accepter son offre sympathique ; nous ne pensons plus qu'à nous en aller. Nous finissons malgré tout par accepter, et nous donnons rendez-vous tous les trois dans les hauteurs à 19h pour boire un verre au rez de chaussée d'un hôtel, un peu chic, dont la terrasse offre une vue superbe sur toute la médina.
Il est 17h et nous le quittons et partons à pied tranquillement en direction de l'hôtel. Comme nous voulons profiter un peu de la vue tous les deux avant que K. n'arrive, nous prenons un taxi. Celui-ci ne met pas le compteur et nous annonce à l'arrivée un tarif plus élevé que la normale. Nous négocions un peu mais l'échange reste sympathique. "c'est pas cher! A Paris vous payez combien pour un taxi?". Nous ne pouvons évidemment pas grand chose à répondre à pareil argument.
En haut, nous contemplons la vue. Le jour décline peu à peu. Autour de nous un certain nombre de personnes profite du panorama ; plutôt des jeunes. Ambiance calme propice à la rêverie et aux méditations. Tristesse d'I. qui cherche à comprendre ce qui nous arrive : pourquoi elle ne parvient pas à retrouver ce qu'elle aimait ici et à le partager avec moi. Qu'est-ce qui bloque? Pourquoi ça ne prend pas? Au fil de notre discussion, les choses s'apaisent et les noeuds se dénouent. Nous partons un peu plus loin visiter les ruines et prenons quelques photos.

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K. nous attend dans le hall de l'hôtel. Il est déjà arrivé et a profité de son avance pour se détendre. On nous installe en terrasse avec vue plongeante sur la médina. La soirée passe de manière très détendue et agréable. Nos échanges passent par les sujets les plus divers : nos vies respectives ; la politique ; la vie au Maroc ; la famille ; le couple ; les enfants. Il nous fait part aussi de ses difficultés en tant qu'enseignant et de ses espoirs.
Nous nous quittons à 20h30 aux portes de la médina en nous donnant rdv à 15h le lendemain près de notre maison d'hôte. Nous projetons de nous rendre ce soir au premier restaurant conseillé par A.
En descendant, sur le chemin, un jeune gars à casquette nous alpague pour nous proposer de nous accompagner précisément jusqu'au restaurant vers lequel nous nous dirigeons. Il nous tient compagnie jusqu'à la porte. Nous empruntons les longs et étroits escaliers d'un restaurant d'aspect assez typique qui nous mènent jusqu'à une petite salle très joliment décorée et pleine de petits coussins. Nous nous y retrouvons seuls : l'heure est visiblement tardive pour dîner et nous ne sommes de toute évidence pas encore adaptés au rythme de vie de l'endroit. Un jeune homme habillé en tenue traditionnelle - très discret, courtois et sympathique, aux yeux très clairs, et dont les traits renvoient plus aux visages de l'est qu'à ceux des marocains malgré toute leur diversité - nous sert un délicieux tajine couscous.
Après avoir pris le thé et réglé la note, nous retrouvons dehors le jeune qui nous a visiblement attendu, et qui nous escorte de nouveau bien que nous lui signifiions que nous n'avons pas besoin de lui pour rentrer.
Arrivé à destination, il nous demande immanquablement quelque chose, et après moult discussions je finis par lui donner un billet en lui rappelant que nous ne lui avions rien demandé. Il nous remercie et nous souhaite "Bienvenue au Maroc!". Près de notre porte, deux petits gars d'une vingtaine d'années installés sur des chaises en plastique semblent dans un état second ; ils nous sourient et nous souhaitent gentiment la bienvenue et une bonne nuit. Nous remontons, et je suis un peu remué intérieurement : l'impression de percevoir déjà les choses différemment, sous un autre angle. Nous passons par le point internet et I. informe par mail notre propriétaire qu'au final nous resterons à Fès le temps initialement prévu. "Etrangement" nous éprouvons une légère appréhension à l'idée de ne pouvoir rester et que notre chambre aie été cédée pour le lendemain à quelqu'un d'autre.

12:10 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maroc, voyage, fès, maghreb

30/06/2012

Etat

L’année s’est achevée qui continue pourtant comme sourde à son état.
Plus rien ne se passe mais tout te poursuit.

Tu évolues sans trop savoir quoi faire de ce corps alourdi.
Ta gravité même a fait place à la pesanteur.
Comme tu n’aimes pas ce temps qui enfle et accable. Et cette langueur, cette mollesse.

Te tirent autre part de trop nombreux possibles
Mieux vaudrait le mur bête sur lequel s’essayer vainement les poings que ces horizons improbables qui font craindre la bascule dans l’espace sans accroches.

19:27 Écrit par Neothene dans Epines, Méditations, Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0)

10/05/2012

Maroc 1er mars - Fès (3ème journée)

Jeudi

Lever à 8h00. A. et J. nous tiennent un peu compagnie pendant le petit déjeuner. Nous prenons quelques photos. Il fait frais et brumeux.
Préparation des bagages. Puis nous remercions nos hôtes et prenons avec eux quelques clichés en souvenir, avant de partir escortés par A. jusqu'en bas pour prendre un « petit taxi » ; ici on reconnaît ces véhicules à leur couleur bleue. Nous passons en chemin par une petite épicerie en prévision du trajet en train.
Arrivons très en avance à la gare. Départ du train à 10h40.
Derrière la vitre, les paysages défilent. Paysage vallonné parsemé ça et là de petits lotissements en parpaing ou en briques rouges construits à la va-vite avec les moyens du bord. Beaucoup ne sont pas encore terminés. Parterres et haies de cactus rackets. De très nombreux détritus jonchent le sol ; beaucoup des déchets en plastique comme ces sacs bleus qu'on retrouve absolument partout. Certains endroits font ainsi figure de véritable décharges. Des animaux d'élevage errent ça et là sans aucune barrière pour les arrêter. Des moutons, des vaches, des ânes, des chiens, tous mêlés et circulant entre les maisons, au milieu des champs broutant tout ce qu'ils trouvent. Impression d'extrême pauvreté et de total abandon. J'aperçois de temps en temps un homme ou une femme assis par terre au milieu de ce désordre, le regard perdu. Le train s'arrête soudain pendant une quinzaine de minutes. Au dehors, paysage vert aux arbres quasi absents.
Un type d'une trentaine ou d'une quarantaine d'années s'installe non loin de nous et nous aborde. Il est originaire de Fès. Nous parle un peu de la ville, et de son travail : il fait partie d'une compagnie de transport pour touristes. Message reçu. Comme nous ne semblons montrer aucun intérêt particulier pour cette histoire de transport, il finit assez rapidement par se relever et changer de wagon en quête de clients éventuels.
Le train repart et les paysages  verts ou arides se succèdent de nouveau. Ici un âne, ici un mini troupeau de vaches. Ici une sorte de canal. Plus loin un chien, puis encore des ânes. Encore des cactus rackets disposés en haies, des chantiers, des détritus.
Au niveau de Assilah, les choses commencent à changer un peu. Bord de mer. Des villas. Mais un peu plus loin, nous retrouvons nos vaches vagabondes au milieu de tas de rails rouillés
Le paysage devient progressivement plus vert. Plantations de petits arbres bien ordonnées. Mais par intermittences toujours ces îlots de grande pauvreté. A un moment, I. aperçoit à côté des pylônes d'un grand pont moderne un homme juché sur un dromadaire.
Gare Tletta Rissana. Des gamins jouent au foot devant un grand mur non loin des voies. Autour maisons de plain-pied un peu déglinguées. Quelques tracteurs, signe que le niveau de vie est légèrement plus élevé par ici. Plus loin, malgré tout, une tente rudimentaire installée très près de la voie au milieu de rails rouillés. Quelques ânes se baladent à côté.
Gare Ksar El Kebir. Un peu partout des équerres en béton. Beaucoup d'habitations rouge cerise de deux ou trois étages en forme de cubes.
Puis une longue route de stands de poteries serrés les uns contre les autres.
Ensuite des champs de mandariniers. Beaucoup de petits fleurs oranges un peu partout.
Sidi Kacem. Des infrastructures industrielles. Champs et cultures sont devenus ordonnés. Zone est de toute évidence plus prospère et plus développée.
Enfin, nous arrivons à Meknès. De nombreux tags décorent les murs. Un certain nombre atteste d'une très bonne maîtrise du dessin, et attire l’œil par leur créativité et leur originalité.
Je passe aux toilettes avant que nous n'arrivions à Fès. Le distributeur de savon semble vide depuis longtemps et la cuvette complètement bouchée est remplie de papier en court de désagrégation flottant dans l'urine au milieu d’excréments. J'ai l'estomac au bord des lèvres et je suis heureux de n'avoir fait qu'un très léger repas avant d'y passer.

Arrivée à Fès. Un jeune marocain pas très grand nous attend. Il nous mène jusqu'à un rempart de chauffeurs de taxi. Négociation du prix entre le jeune marocain et un grand et maigre chauffeur à lunettes fumés et à deux de tension. Le prix annoncé nous semble excessif, mais n'étant pas à l'origine de la négociation nous ne discutons pas ce qui a été convenu.
Une fois arrivés aux portes de la médina de Fès, nous payons et suivons notre guide. La descente dans la médina me paraît interminable car je transporte un sac assez lourd que je ne peux faire roulé . De nombreux marchands m'alpaguent en chemin, ce qui m'énerve car je ne comprends pas leur attitude : vue l'allure à laquelle j'avance chargé comme un mulet, je ne suis de toute évidence pas en mesure de m'adonner à une quelconque transaction ; j'arrive à peine.
Une fois parvenus à la maison d'hôte, nous sommes accueillis par A., un marocain d'une quarantaine d'années portant rayban, qui après s'être présenté nous demande nos passeports et les épluche à la manière d'un douanier syrien. Quelques remarques sur les numéros d'enregistrement qui devraient se suivre mais qui ne suivent pas « vous n'êtes pas arrivés en même temps ? », « c'est bizarre ... »; I. et moi nous regardons. Comme la chose s'éternise nous commençons l'un et  l'autre à être passablement agacés. Nous remplissons ensuite une fiche de renseignements et puis montons voir la chambre après avoir été invités à boire le thé sur la terrasse juste à côté, et qu'on nous ait donné un plan de la médina et indiqué une ou deux bonnes adresses de restaurants. Nous ne savons quoi penser, un peu déstabilises et fatigués ; le changement dans un environnement qui nous semble nettement plus oppressant que Tanger ; l'attitude un peu plus strictement "professionnelle" des deux personnes qui nous ont accueillis ici ; tous ces marchands ou autres qui nous ont alpagués tout au long de la descente ; le coût apparemment un peu excessif du trajet en taxi ; nous sommes un peu sur la défensive et mal à l'aise. L'impression d'être ici des porte-monnaie sur pattes dont on cherche à tirer le maximum. Notre première impulsion une fois posés dans la chambre : chercher un moyen de nous en aller rapidement. Nous décidons, dans un premier temps, de nous extraire des entrailles de la médina jusqu'au soir. Pour ce faire, re trajet en sens inverse et re harcèlement incessant ; "Welcome my friend", "hello!", "français?", "please? good price for you !", "cannabis?", "tanneries", "good restaurant", "vous cherchez quelque chose?" etc pendant un bon quart d'heure. Nous nous sentons obligés de regarder fixement devant nous sans répondre et ne profitons de rien de ce qui nous entoure.
Une fois sortis, nous attrapons un taxi pour la ville nouvelle qui nous fera payer un quart de ce que l'autre nous avait demandé à l'aller.
Dans la nouvelle ville, I. retrouve avec joie ses anciens collègues. Je suis heureux aussi de mon côté de ces retrouvailles, et je prends plaisir à jouir de rapports enfin normaux avec des gens d'ici. Une de ses anciennes collègues nous propose de l'accompagner en voiture chercher ses filles à l'école et à la crèche. Durant le trajet, échange de souvenirs, discussion sur la situation actuelle, notre ressenti en ce qui concerne la médina - elle nous explique qu'elle n'y met jamais les pieds - et ce que nous projetons de faire, à savoir partir en direction d'une autre destination et trouver un prétexte pour annuler prématurément notre séjour.
Après avoir récupéré les trois petites, très mignonnes, la collègue d'I. nous dépose en centre-ville. Nous nous promenons tranquillement un petit moment et nous sentons soulagés ; ici, nous pouvons marcher librement sans être détaillés ni importunés. Je retrouve un peu des sensations de notre voyage en Syrie lorsque nous errions au hasard dans Damas. I. me mène jusqu'à une pizzeria dans laquelle elle avait l'habitude de déjeuner assez régulièrement lorsqu'elle résidait ici. L'ambiance est très détendue et le dîner très agréable. Durant ce repas, nous réfléchissons à un moyen de partir.
Il nous faut nous en retourner dans notre chambre. Une fois déposés par le taxi nous retraversons toute la partie de la médina par parvenir au logement. La plus grande partie des boutiques est fermée ce qui ne nous empêche pas de nous faire encore et encore alpaguer pour nous attirer à des restaurants, pour nous refourguer du cannabis, etc. Des grappes de gars zonent les mains dans les poches un peu partout et nous regardent passer. Je suis tendu et la légère appréhension que je ressens chez I. qui agrippe le bras un peu crispée n'arrange pas les choses. Quand enfin nous arrivons à proximité de la chambre d'hôte, nous sommes obligés pour la regagner de nous engouffrer dans une minuscule et obscure artère  à l'entrée de laquelle un groupe de quatre ou cinq jeunes mecs sont en train de tirer sur le joint qu'ils se font passer. Ambiance.

23:46 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maroc, vacances, fès

25/03/2012

Maroc 29 février - Tanger (2ème journée)

Petit déjeuner sur la terrasse. Discutons avec A. et J. de ce que nous avons fait la veille. J. nous conseille de régler la question des billets de train à l'avance pour éviter stress et tracasseries. Je demande à A. lorsqu'il vient rechercher notre plateau si éventuellement ils acceptent d'accueillir des enfants. Il me répond par la négative ; le lieu comporte trop de dangers pour un petit, pas avant 13 ans. Avec les escaliers très raides, la terrasse, etc. « It's not a good idea ». Mais lorsque nous redescendons ils nous attendent tous les deux au niveau de la cuisine. J. nous demande quel âge à notre enfant, si nous avons une photo d'elle, la trouve très mignonne et nous explique que maintenant qu'ils nous connaissent un peu, ils peuvent peut-être envisager le fait que nous emmenions notre fille une prochaine fois.
Descendons par la médina jusqu'à l'avenue Mohammed VI que nous empruntons pour rejoindre la gare et acheter nos billets à l'avance. A. nous a indiqué comment rejoindre la gare et la durée approximative du trajet à pieds. Plage et palmiers d'un côté, immeubles ultramodernes de l'autre, avec ici et là un certain nombre de chantiers et d'immeubles en construction.
Autour de la gare, même panorama. Sur les pelouses et les terre-pleins des ouvriers prennent leur pause déjeuner. Certains sont allongés et semblent dormir.
Une fois munis de nos billets, nous prenons un taxi avec lequel il faudra marchander car il nous fait de toute évidence un tarif spécial touristes. Arrivés sur la place du grand Socco, nous remontons un rue sur la gauche en direction de la partie moderne de la ville. Dans une petite descente sur la gauche un peu après quatre cinq parterres de lunettes de soleil et d'accessoires se tient le restaurant où nous projetons de déjeuner spécialisé dans le poisson. Nous demandant s'il est réellement ouvert en raison du gros bout de bois qui en condamne l'accès, nous finissons tout de même par entrer sur invitation d'un des serveurs. A côté de la table où on nous installe, un couple de français accompagnés d'une petite fille de 5 ou 6 ans est en train de déjeuner. Un serveur d'une quarantaine d'années, crâne tondu nous apporte régulièrement les plats qui composent ce repas très copieux. A chaque plat apporté, le serveur nous lance un « bonjour ! Comment ça va ! Et les enfants ? La famille ? » Etc... Le petit manège qui m'amuse au début finit par me lasser. La fatigue occasionnée par la journée de la veille commence à me tomber dessus. Le côté sympa des gens du restaurant, à tort ou à raison, me paraît factice. Un vieux homme dont on ne connaît pas la fonction au sein du restaurant passe de table en table pour s'informer de l'avancée de chaque repas, si tout va bien, etc. Mais les choses s'éclairent lorsqu'à la fin du repas il nous invite à le suivre dans une salle derrière. Là, nous découvrons son énorme marmite en cuivre ; il y fait mijoter un des plats pour la journée du lendemain. Il nous offre un petit panier en osier avec une poterie et des ustensiles en bois. Lorsqu'il apprend que nous sommes mariés, il nous mène de nouveau au fond où il nous offre une petite boîte remplie d'une huile dont il nous explique les vertus multiples et l'utilisation.
Sur le chemin pour rentrer, nous nous faisons alpaguer pour un vieux bonhomme à lunettes habillé d'une djellaba. Je le reconnais : sur le chemin la veille, il nous a proposé discrètement du cannabis. Je n'aime pas son regard et il ne m'inspire aucune confiance. Mais je commence à être vraiment fatigué et j'ai du mal à m'en dépêtrer. I. finit par s'en méler. L'homme lui dit alors quelque chose que j'identifie à une insulte, et lorsque cette fois vraiment énervé je vais pour le remettre fermement à sa place, I. m'empêche d'intervenir. Nous nous chamaillons : I. n'a pas entendu d'insulte mais une exclamation et elle me reproche de ne pas me montrer suffisamment ferme d'emblée avec ce genre de personnes. Je suis quant à moi persuadé qu'il l'a insultée, et je ne comprends pas qu'elle m'ait empêché de réagir tout en me reprochant de ne pas me montrer assez ferme. Je reste silencieux et tendu lorsque nous rentrons. Et lorsque nous ressortons je ne suis toujours pas parvenu à me défaire de ma mauvaise « tournure d'esprit ». Tout me pèse et je n'ai plus du tout envie d'être là ; l'enchantement de la veille a disparu pour ne plus laisser place qu'à la déprime et au dégoût. Nous marchons longuement et un peu au hasard des rues. Je me force à prendre quelques photos.
Après avoir tenté de nous rendre à deux adresses conseillées par A. et J. mais malheureusement fermées, je propose à I. de nous rendre au Café de France. A. nous a conseillé la veille de nous y arrêter pour observer les gens et la vie de la rue. Nous y installons et je ne parviens toujours pas à sortir de mon mutisme ; je prends conscience que je suis épuisé et les mots me reviennent peu à peu. Echangeons nos impressions. La parole me déleste du fardeau comme par magie. Les émotions trouvent enfin des mots pour les exprimer. Je me sens toujours fatigué mais soulagé. Nous restons un bon moment à observer les gens à l'intérieur et à l'extérieur du café. I. m'explique la nécessité de trouver par moments des « zones de replis » comme celle-ci.
Repartons pour notre hébergement. Toujours dans le même tronçon de ruelle, un autre type m'alpague auquel je ne réponds tout simplement pas. Puis un autre un peu plus loin qui joue visiblement les rabatteurs pour un restaurant et que je garde lui aussi à distance.
Arrivés à la maison d'hôte, nous passons un moment sur la terrasse. La nuit est tombée. Un Muezzin  lance son appel, puis un autre, et un autre, et un autre. Polyphonie à laquelle cette fois je ne trouve plus aucun charme. Je reste un peu indifférent à regarder les lumières de la ville. Un peu plus loin, on aperçoit celle de l'Espagne. I. tente de prendre quelques photos de nuit avec son portable et je reste affalé à regarder le panorama. Comme je suis crevé, tendu, mon esprit tend comme chaque fois dans cette situation vers une sorte d'irrationnel ; je suis un obnubilé par l'idée qu'I. Puisse laisser tomber par maladresse son téléphone dans le vide. Pitoyable.
Nous descendons vers 20h00. A. et J. sont en bas et nous demandent comment s'est passé cette journée. Ils nous proposent de faire du feu dans le gigantesque poêle car le temps s'est considérablement rafraîchi. Faisons part chacun de nos impressions, nous les questionnons sur leur parcours, leurs origines, etc. Comme nous envisageons de nous rendre au restaurant un peu classe et tranquille que nous n'étions parvenu à trouver la veille au soir, A. nous propose de nous faire accompagner par H., un monsieur très chaleureux et courtois.
Au restaurant, ambiance tamisée. Presque personne dans ce décor à la fois classe et minimaliste. Un français un peu chic d'une cinquantaine d'années et un jeune marocain très sympathique nous accueillent. Le jeune homme viendra régulièrement nous voir tout au long de ce repas composé de tajines et de vin ; nous discutons d'expressions arabes, de prononciation ; il rit un peu de notre difficulté à prononcer certaines lettres.
Au final, nous passons une excellente et reposante soirée.
H. nous attend à la sortie du restaurant. Je ne peux m'empêcher de me sentir un peu gêné par la situation, mais I. me dit que les choses étaient convenues de cette manière. H. nous souhaite bonne nuit et nous rentrons nous coucher.

23:49 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maroc, voyage, vacances

11/03/2012

Maroc 28 février. Tanger.

Décollage à 8h30. Nous traversons un plafond de nuages. Impression de tout laisser derrière moi. Puis à l'horizontale, enfin. Belle lumière rose. Nous planons au dessus d'un tapis de nuages  granuleux extrêmement compact. Après avoir pris le petit déjeuner servi par la compagnie et potassé la brochure laissée à notre disposition, je constate que nous survolons déjà l'Espagne. Files d'éoliennes le long des crêtes des massifs espagnoles. L'altitude est maintenant supérieure à 10 000 km et la température de -74° à l'extérieur. Traversée du Détroit de Gibraltar très rapide. Nous sommes presque arrivés. Nous survolons la côte à si basse altitude que j'ai l'impression que nous allons atterrir sur la plage.


A l'aéroport de Tanger. Change. A la sortie, F. nous attend. C'est un jeune marocain très sympathique d'une trentaine d'années environ à la voix rauque de grand fumeur, habillé en jeans et blouson de cuir avec sur la tête une casquette à l'ancienne qu'il porte la visière au raz des yeux ce qui lui donne un peu des airs de macho italien ou espagnol. Il nous invite à monter à l'arrière de sa minuscule fourgonnette rouge. L'intérieur vaut le détour : nous sommes assis sur une banquette à ressort avec un tapis marocain à nos pieds. A l'avant, le tableau de bord est recouvert d'une sorte de fourrure ; aux poignées entourées de bandanas rouges de chaque côté du pare-brise sont attachés des schtrompfs en pluche. J'observe la vie tout autour. Impression de liberté dans les attitudes et de vitalité. Les gens traversent les rues à l'arrache, les banquettes arrières des taxis couleur sable supportent quatre personnes, de jeunes gars sans casques slaloment en mobylettes entre les voitures et les gens.
Durant le trajet, F. hèle plusieurs personnes à travers la portière ; il s'arrête parfois cinq secondes pour leur parler. La taille de son véhicule lui permet de circuler dans les artères de la médina et nous arrivons très rapidement chez nos hôtes.

A. et J., couple d'américains d'une cinquantaine d'années installés à Tanger sont très décontractés et sympathiques, un peu baba mais en plus chic et sobre. Ils nous font visiter une petite chambre au rez de chaussée dans les tons vert émeraude très haute de plafond et recouverte par endroits de mosaïque. Une fenêtre avec vitraux de couleur protégée par un grillage ouvragé donne sur la rue et sur une fontaine. L'ensemble est à la fois très joli, typique et intime. Nous visitons ensuite le reste de la maison toute en hauteur. Les escaliers recouverts de mosaïque sur très étroits et très raides. A un étage, un coin cuisine ; à un autre, un coin salon, etc. Nous finissons par arriver sur une petit terrasse pourvue d'un coin véranda qui offre une vision panoramique de toute la médina. On nous y installe pour prendre le thé tranquillement. Nous y restons une petit heure à jouir de la perspective offerte par l'endroit. Pas très loin, la mer. Tout autour de nous, une juxtaposition de petites maisons blanches avec terrasses et fouillis de paraboles et d'antennes télé. J. remonte nous voir et nous propose de faire le tour du quartier pour nos donner quelques points de repères dans ce labyrinthe et quelques bonnes adresses. Durant une demie heure,    A. nous explique un certain nombre de choses et nous donne des repères visuels ; son attitude et celle de J. et les relations très amicales qu'ils semblent entretenir tous deux avec les gens du quartier témoignent de leur intégration dans la vie de la médina. Arrivés à la grande place, après nous avoir demandé si nous nous sentions capables de retrouver notre chemin, ils nous laissent profiter de la ville.

Parmi les adresses qu'ils nous ont indiquées, nous nous rabattons sur une toute petite gargote sans enseigne. Une femme aux yeux clairs assez jeune et très gironde nous montre, exposés sur le comptoir derrière lequel elle se tient, les différents tajines du jour. Nous nous installons sur l'unique table placée au milieu de la petite salle et recouverte d'une toile cirée. Le long des murs autour des supports permettent aussi à quelques personnes de se poser pour prendre leur repas. Je contemple un court instant le gros frigidaire sixties vert et un peu délabré placé à côté de l'entrée. Deux ou trois matous rentrent et sortent régulièrement, inspectant les lieux à chaque passage dans l'espoir de glaner quelques bricoles. Comme nos voisins de table, nous savourons notre tajine tout en jetant régulièrement un œil sur la petite télévision placée tout en hauteur qui diffuse les informations du jour. Les sujets internationaux abordés de même que la manière de les présenter donnent quelque chose de visiblement similaire à ce que nous connaissons ; sans connaître la langue nous comprenons en substance ce qui se dit dans la lucarne.

Une fois sortis, nous décidons d'aller sur la petite place plus bas prendre le thé à l'adresse conseillée par J. même si l'endroit n'a à première vue  rien de bien réjouissant comme elle nous en a avertis. Une minuscule salle donne directement sur la rue et en terrasse, assis dans deux chaises en plastique en triste état, deux vieux marocains en tenues traditionnelles et à l'air rugueux fument le kif au moyen de longues pipes sculptées. A l'intérieur quelques tables le long d'un mur, au fond on discute et on fume visiblement la même chose qu'en terrasse. Sur le côté, un homme d'une quarantaine d'années affairé derrière de petits réchauds à gaz rudimentaires nous souhaite la bienvenue. Il se rappelle de nous, il nous a vu passer tout à l'heure avec A. et J. qui l'ont salué de loin. I. prend un grand café au lait et moi un thé à la menthe. Un vieux monsieur en djellaba se tient assis à la table juste devant nous. Le patron du café change de chaîne sur la petite télé placée en hauteur à l'entrée ; il met une chaîne européenne. C'est une marque d'attention à notre endroit. I. me fait remarquer à juste titre qu'on imagine assez mal la chose transposée chez nous : imaginez un marocain en djellaba ne parlant presque pas français qui se pointerait dans le micro troquet d'une petite ville  française, et à qui on mettrait Al Jazira par courtoisie. Surréaliste. Sur l'écran des mannequins aux tenues on ne peut plus minimalistes se déhanchent de manière très marquée en parcourant un long podium. Le vieux homme devant nous trouve le spectacle visiblement plaisant et très amusant. Il nous prend à témoin de ce qu'il voit avec force gestes, se cache les yeux, puis fait mine de repousser des deux mains les images en riant et en détournant la tête. S'en est trop pour lui, il n'a plus l'âge. Nous rions avec lui de la situation. De temps à autre, en arrière fond, un chant de coq sort de nulle part. Puis le vieux homme finit par se lever une fois bu son thé et nous salue d' un « aureuvoir » en nous souriant.

Une fois sortis, nous déambulons au hasard des ruelles. Nous finissons par atterrir dans un marché proposant viande et poissons. Ici, moi qui aimerais être végétarien si je n'aimais pas tant la viande, je suis mis à rude épreuve. Tout autour de moi des chapelets de viscères qui pendouillent, des pieds de moutons fraîchement découpés entreposés par terre ; ici et là des flaques de sang séché, des poulets démembrés accrochés un peu partout ; un peu plus loin, un type qui grattent un patte de mouton, et puis l'odeur, et cette énorme tête de bœuf renversée sur un comptoir et partiellement dépiautée et puis ces quelques mouches qui voltent autour de tout ça. Est-ce dû à la traversée de cette partie ? mais la salle dédiée à la poissonnerie, avec ses énormes tas de poissons jetés les uns sur les autres sans glace pour les conserver, ne m'inspire guère plus. L'exotisme peut résider aussi dans ce genre de choses.
Repartons, espérant grâce aux conseils avisés de A. retrouver rapidement notre logement. Après quelques allers et venues et bien des hésitations, nous parvenons enfin à bon port.

Sieste. Au dehors la rue comme si nous y étions. Mais je suis si fatigué qu'une fois endormi le muezzin ne parvient même pas à me réveiller. Trois quarts d'heure plus tard, j'ouvre les yeux. Au dehors des petits sont en train de jouer à proximité de la fontaine. Beaucoup de rires. Des bruits d'eau. Un chat qui s'est réfugié sur l'appui de notre fenêtre se fait asperger d'eau ; les gouttes viennent s'écraser sur les vitraux et je vois la silhouette du chat qui se recroqueville.

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Sortons nous promener le long des remparts donnant sur la mer. Le temps est très agréable. Autour de nous beaucoup d'enfants et de vie. Puis un homme en djellaba qui sort de chez lui nous salue et nous indique que nous sommes dans un quartier musulman et ancien. « Rien de moderne par ici. Quartier musulman. Les Falaises... ».
Nous finissons par atterrir sur une petite place pourvue de quelques bancs en bois un peu déglingués. Autour de nous, des mères avec les enfants et des jeunes qui discutent. Puis repartons et nous retrouvons sur la place du Grand Socco où A. et J. nous avaient laissés en fin de matinée. Plus haut, la partie moderne de la ville. Beaucoup d'animation en ce début de soirée.


Très fatigués par notre longue marche et par le voyage, nous décidons de retourner nous reposer à la maison d'hôte. Il nous faut retrouver notre chemin dans le méandre des ruelles. Un vieux homme nous entreprend et veux nous montrer une boutique « pour le plaisir des yeux seulement. Pas pour acheter. ». Pensant qu'il s'agit de sa boutique, nous nous montrons courtois et acceptons de le suivre. Il nous mène jusqu'à une boutique d'herboriste et nous présente avant de s'éclipser à un homme d'une trentaine d'années qui se lance dans un exposé de son activité. L'homme nous fait sentir différents produits et nous en explique les vertus. J'écoute distraitement et mes yeux parcourent les longues rangées de gros bocaux exposés sur les étagères. Il finit par nous laisser « regarder » pour accueillir deux autres personnes (des locaux cette fois). Nous restons le temps minimum par politesse, puis ressortons en le saluant. « A bientôt. N'hésitez pas à repasser ». Une fois dans la rue, le vieux homme en djellaba nous attend et après quelques pas nous demande quelques dirhams. Nous refusons poliment. Après avoir fait un crochet par un petite épicerie, nous rentrons et passons une partie de la soirée sur la terrasse à profiter de la vue tout en mangeant de la vache-qui-rit sur du pain et en buvant un soda à la pomme très sucré.

15:26 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maroc, vacances, voyage, carnet, maghreb

24/03/2009

Syrie (notes) VIII

Vendredi

Journée tranquille. Nous reposons encore et encore. Sortons faire deux trois courses dans le quartier.

Le soir, nous nous rendons chez H. Passons par une pâtisserie pour leur prendre deux ou trois bricoles. Je reste dans le taxi pendant qu'I.s'en charge. Nous aurons ce soir la chance de voir une nouvelle fois A. qui est en permission. Passons une bonne soirée. Discute un peu avec A. pendant que les filles sont ensembles Regardons d'un oeil les informations. On peut voir notamment une intervention du leader du Hezbollah, personnage dont on peut assez régulièrement apercevoir le visage barbu surmonté du turban noir typique sur des affichettes collées au hasard des rues, encadré et fixé au mur d'une boutique d'alimentation ou d'artisanat, ou plus rarement en pochoir sur un pare-brisse. Mais sa popularité est insignifiante comparée à celle du chef de l'Etat. Le voilà parti dans ce qui semble être une diatribe. Le verbe se fait péremptoire et un brin agressif. Je demande à A. ce qu'il en pense. Il m'explique qu'en fait le propos tenu est anecdotique et cette manière de s'exprimer est purement rhétorique. De l'art oratoire donc, et nullement de l'agressivité.

La petite, adorable est scotchée à son papa qu'elle ne voit pas assez ces derniers temps.

A. s'occupera durant la soirée de nous réserver par téléphone le car pour notre trajet de demain. Nous devons nous rendre à Alep pour trois jours. H. et A. se sont arrangé pour nous trouver un petit appartement. Le lieu est habituellement habité par le fils d'une amie de la voisine d'H.qui fait ses études à Alep. Notre venue lui permettra sûrement de se faire un peu d'argent de poche. Il résidera chez sa mère durant les trois jours.

Rentrons une nouvelle fois râvis de cette agréable soirée. Les rues toujours pleines de vie défilent très vite derrière les vitres du taxi qui nous ramène.

Samedi

Nous prenons le taxi à 11h pour la gare routière. Les sacs sont faits, nous quittons notre appartement tout en sachant que nous y reviendrons pour les derniers jours de notre séjour.

 

A notre arrivée à la gare routière, contrôle des bagages. Passons par un portillon. Puis arpentons une allée jonchée de préfabriqués qui abritent différentes compagnies de car. Aux abords de chacune, des « rabatteurs» font moultes signes et rivalisent de puissance vocale pour attirer le voyageur. Nous finissons par trouver la compagnie qui doit nous emmener à Alep. Enregistrement, vérifications. Patientons dans l'allée, un peu à l'ombre. Puis repassons par un sas de sécurité pour accéder au car. Véhicule d'apparence très confortable. Je dois néanmoins en redescendre aussitôt pour chercher les passeports que nous devons présenter aussitôt installer. J'aperçois, à l'intérieur du car, une femme recouverte intégralement de noir. Il est impossible d'apercevoir ne serait-ce que ses yeux. Départ.

Un stewart sert des verres d'eau et distribue des bonbons. Puis il fait démarrer un dvd que les personnes éventuellement intéressées peuvent suivre sur un écran à l'avant du véhicule au dessus du parebrise. Il s'agit d'un grosse production comique qui ne semble capter l'attention de personne.

Derrière la vitre, tandis que nous sommes bien au frais, défile un paysage d'une aridité extrême. Des collines de caillasse, de la pauvreté. On serait tenté d'y voir quelque chose comme de la désolation.

Vers Homs, le paysage devient plus verdoyant. Nous nous y arrêtons pour manger quelque chose. Repartons dix minutes plus tard à peine. Impression de sauter dans le car en marche.

Durant le trajet, une femme semble constamment prendre à parti le stewart. Nous ne comprenons pas ce qu'elle lui veut, mais sa manière de s'exprimer assez vulgaire et son allure la désignent d'emblée comme « la rombière » type. Le genre qui tape son scandale pour des broutilles. Le service visiblement irréprochable de l'employé ne fait que renforcer notre sentiment.

A la descente du car, au moment de récupérer les bagages, le « jules » de notre marchande de poisson s'approche du stewart et lui administre une giffle. S'en suit une petite bagarre vite interrompue par une petite foule qui s'empresse de séparer les deux protagonistes. Ça s'agite, ça crie. Des agents interviennent et on perd la chose de vue.

Un jeune homme nous repère et nous fait signe de le suivre comme d'ailleurs tous les taxis à l'arrêt que nous croisons. Il s'agit de notre fameux étudiant. Très courtois, il se charge de nos bagages. Durant le voyage, il échange avec nous deux mots en anglais. Alep nous apparaît d'emblée comme beaucoup propre et soignée que Damas. L'atmosphère y est aussi nettement moins lourde et polluée. Une ville plus aisée de toute évidence.

Pénétrons dans l'appartement. A l'intérieur, la maman du jeune homme semble venir de terminer le ménage. Elle nous salue d'un sourire et d'un hochement de tête. Son fils nous donne deux trois renseignements, deux trois conseils. Nous écrit en « latin » le nom de la rue et du quartier où nous logeons afin que nous puissions l'indiquer aux taxis de retour de nos divers déplacements. Je lui donne enfin la somme correspondant à nos trois jours de location. Sa mère et lui nous saluent et nous souhaitent un bon séjour.

L'appartement est très sobre. C'est un peu l'inverse de celui dont nous disposons à Damas. Nous nous y sentons plus dans notre élément. Nous voilà en quelque sorte dans un environnement plus familier. Mobilier minimaliste, murs nus et blancs. Peu d'objets.

Nous dormons un peu, puis sortons chercher de quoi manger. Il fait déjà nuit. A notre grande surprise, nous avons beaucoup de mal à trouver de quoi nous sustenter. Le quartier ne nous offre pas la même profusion de petites épiceries populaires qu'à Damas. De plus, l'ambiance est très différente. Les quelques enfants que nous croisons nous dévisagent. Légère hostilité. C'est pour nous comme un indicateur relativement fiable du reste. Parcourons une grande artère. On y aperçoit de belles boutiques de meubles, de vêtements, etc. Dehors beaucoup de femmes voilées intégralement en noir. L'ambiance, elle, n'a rien de commun avec celle de Damas. Nous rentrons manger et nous coucher peu convaincus par notre brève escapade.

Nous réalisons que nous sommes juste à côté d'une mosquée lorsque l'appel à la prière retentit de manière tonitruante d'une voix pleine de saturation comme j'ai appris à l'apprécier; mon âme de rockeur rejoint sans doute là mon âme spirituelle. Mais l'appel du milieu de la nuit nous paraît ici interminable. Nous nous demandons si la chose est propre à Alep.

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Fayrouz - Oudak Rannan

17:28 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voyage, syrie, moyen-orient, alep, pays arabes, vacance

22/03/2009

Syrie (notes) VII

Mercredi

C'est au tour d'I. d'être ko. De mon côté, ça commence à s'arranger.

Nous devons nous occuper de ce fameux renouvellement de visa, obligatoire au bout de quinze jours de présence sur le territoire. Les bureaux ferment à 15h. Partons un peu à l'arrache. Prenons taxi, puis cherchons le bureau de l'immigration. Le plan dont nous sommes munis comporte visiblement certaines erreurs qui rendent la recherche pénible et laborieuse. Je demande partout des informations, mais tous ces gens pour la plupart sympatiques, serviables et pleins de bonne volonté ne me comprennent que difficilement. En retour, ceux qui me comprennent finalement ne parviennent pas à se faire entendre de moi. Nous voilà bien. On me demande d'où nous venons. Je tente de répondre mais les sourcils se froncent. Je lance alors un « Sarkozy !», et les visages s'éclairent. Voilà à quelles extrêmités on en arrive lorsqu'on est pas foutu de prononcer correctement trois mots d'arabe...

Enfin nous finissons grâce à quelques informations par repèrer le bâtiment administratif que nous cherchons depuis maintenant une demie heure. Il nous reste à peine cinq minutes avant la fermeture des bureaux, et I. ne semble pas bien en forme. Fatiguée, à moitié malade, elle a dû cavaler avec moi dans la chaleur terrible de l'après-midi. L'intérieur du bâtiment nous apporte un peu de fraîcheur. Une fois à l'étage, je fais asseoir I. et me dirige vers le comptoir. Un des deux fonctionnaires en uniforme me montre une pendule; les bureaux viennent de fermer et ils ne peuvent s'occuper de moi. J'insiste en leur faisant comprendre du mieux que je peux que je désire juste savoir si le visa doit bien être reconduit. Ils me font comprendre que ce n'est plus la peine. Comme H. nous l'avait expliqué, la règlementation change très vite en Syrie.

Nous sortons. I. se sent mal. Elle a des vertiges et craint de s'évanouir en pleine rue. La panique qui commence à l'envahir ne fait qu'accroître les symptômes, et elle commence à éprouver des difficultés à respirer. Je l'emmène à l'ombre, la fait asseoir en lui expliquant calmement que je vais acheter une cannette de soda bien frais juste à côté, et qu'une fois qu'elle sera un peu resté à l'ombre et qu'elle aura bu elle se sentira mieux. Heureusement pour nous, tout se passe comme je l'avais annoncé. I. retrouve un peu d'énergie et nous attrapons un taxi pour rentrer. Le chauffeur nous demande un montant exhorbitant, invoquant cette fois le cours du barile de pétrôle. Nous ne paierons qu'un quart de ce qu'il demande, avec la certitude qu'il fait déjà une bonne affaire.

Sur le chemin, j'aperçois l'enseigne d'un club de Ju Jitsu. Je me demande ce que donnent les cours et si beaucoup de jeunes syriens peuvent s'offrir l'inscription.

 

Jeudi

C'est la série des corvées. Après l'histoire du visa, nous devons refaire changer un peu d'argent à l'autre bout de la ville sous peine de nous retrouver très rapidement à cour de liquidités. Je décide de laisser I. se reposer à l'appartement et de partir à pied. Les dernières tractations avec les taxis m'ont passablement énervé et je préfère me passer de leur service pour cette journée. De plus, la perspective de me promener un peu seul à travers Damas ne me déplait pas. Histoire de ressentir différemment cet environnement.

Dans mon périple, je passe par la vieille ville. La chaleur est accablante. Ré emprunte la rue qui longe la Mosquée des Omeyades. Longe la Citadelle. Je m'arrête au niveau de la gare routière pour boire une cannette de coca. A côté, se tient un petit stand de cd. J'y jette un oeil tout en sirotant méthodiquement mon soda. Je repère bon nombre des chanteurs pop à la mode aperçus à la télé les jours précédents, plus quelques disques de chants plus traditionnels. Je me sens un peu fondu dans la masse et l'impression n'est pas désagréable; je participe à toute cette vie et personne ne semble me prêter attention. Je suis râvi de ne pas faire figure de « parfait touriste ». Je monte vers le nord de la ville à la recherche de la CBS. Je demande mon chemin, mais comme je prononce mal le nom du lieu, la personne m'envoie plus haut, sur une place au nom approchant. En désespoir de cause, je finis par me rabattre sur la seconde adresse, un établissement apparemment proche de la gare. Mais le plan montre une nouvelle fois ces limites : l'emplacement ne correspond pas à ce qui se présente à moi. Devant une boutique de chaussures, j'aborde un jeune commerçant qui me fait comprendre qu'il ne parle pas anglais, mais va très gentiment interrompre son collègue en plein marchandage avec un client pour qu'il me renseigne. Je suis stupéfait d'une telle courtoisie. Le jeune vendeur remplace son collègue auprès du client.

Grâce aux précieuses indications récoltées, je parviens enfin à trouver la place tant convoitée. Elle se cachait à deux pas, derrière un gros bâtiment habillé d'une publicité colossale pour une marque de soda vert fluorescent. Mais sur la fameuse place, je tourne, je vire pendant vingt bonnes minutes et ne trouve décidément pas l'établissement indiqué. Il fait vraiment très chaud. Je maudis le guide, puis décide de récolter quelques informations auprès du personnel de l'agence de voyage juste à côté, lesquels me proposent, tout simplement, d'effectuer le change chez eux. Me voilà tiré d'affaire.

Je m'en vais plus loin fêter ce succès en ingurgitant une pinte bien fraîche de mose halib. Dans la pièce au carrelage blanc ouverte sur la rue, je m'avachis sur une des chaises en plastique, et d'un oeil distrait je regarde les informations sur le petit poste placé en hauteur en sirotant ma boisson. Deux robustes syriens à grosses moustaches et à chemises entrouvertes sur leurs torses fournis s'adonnent eux-aussi à cette activité, mais visiblement sans grande conviction. Leurs pensées semblent ailleurs.

Je reprends mon chemin en sens inverse. Et une fois rentré, I. me fait part de sa légère inquiètude durant mon absence. Peur qu'il ne m'arrive quelque chose. En plus, j'apprend que quelqu'un est venu frapper à la porte de l'appartement à plusieurs reprises et avec insistance pendant qu'elle se reposait. Nous n'avons aucune idée de qui il peut s'agir et de ce que la personne pouvait vouloir.

Je passerai la soirée à avaler des litres de liquide, en proie à une sensation de soif inextinguible.

Nous ressortons le soir pour faire les épiceries et les boutiques du sud-ouest. Finissons dans un snack à proximité du périphérique où la faim nous fait nous partager une énorme pizza pour deux qui râvit nos yeux autant que nos ventres qu'elle finit par lester prodigieusement. Un petit serveur très attentionné vient fréquemment nous voir et semble tout heureux de pouvoir enfin utiliser son anglais. Nous parvenons difficilement à terminer notre pizza. La chaleur, à force de faire taire nos appêtits, nous a désabitués aux repas consistants.

Nous rentrons tranquillement en passant par une petite épicerie pour nous procurer de quoi boire (des bulles, du sucre, du frais...).

Je termine la soirée en me replongeant dans le Coran, puis en regardant deux trois bêtises à la télé, histoire de ne pas perdre le rythme.

 

19:37 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : syrie, vacances, moyen orient, damas

19/03/2009

Syrie (notes) VI

Dimanche

Partons pour Seydnaya par le « service ». J'aime prendre le « service » malgré le côté inconfortable de ce moyen de transport. Il procure le sentiment d'entrer un peu dans le quotidien des gens. Promiscuité, fonctionnement collectif tout à fait inhabituel pour nous. Tout le monde se charge de la trésorerie. La somme versée par chacun est collectée par les passagers eux-mêmes qui la font parvenir au fur et à mesure au conducteur. Et tout ceci fonctionne à merveille. Personne ne gruge.

Seydnaya ressemble à un gros village constellé d'églises orthodoxes et de bâtiments en cours de construction. La chaleur y est accablante. Il manque ici de ces zones ombragées si fréquentes à Damas. Nous nous sentons faibles, les jambes un peu flageolantes. L'endroit est néanmoins agréable. Nous visitons un monastère à flanc de falaise. Y passons un bon moment. Icônes dont une fameuse : l'icône de la Vierge. Ambiance très recueillie. Récitation d'un texte sacré par une religieuse. Deux personnes viennent chacune à leur tour s'agenouiller et prier. Gène, en ce qui me concerne. Bien que porté vers les choses spirituelles, je me sens intrus. Je suis ici en « touriste ».

Visite d'une petite église orthodoxe. Un jeune religieux très sympathique tente de nous expliquer certaines choses sur le lieu au moyen de quelques mots d'anglais. Il nous demande si nous sommes orthodoxes. Puis évoque sa famille, ses frères et soeurs dont certains font leurs études en France, justement. Nous visitons la petite boutique à côté de l'église tenue par un autre religieux un peu plus âgé.

Je suis à moitié malade. I. n'est pas en forme non plus. La chaleur est terrible. Nous n'avons pas assez bu (nous sommes maintenant habitués à la chaleur et nous n'éprouvons plus, comme au début du séjour l'envie de boire constament; c'est le piège), avons également tardé à manger, et nous étions déjà un peu fatigués au départ. Nous décidons de rentrer. Nous reprenons le service qui, comme toutes les voitures du coin, possède un rétroviseur intérieur affublé d'une croix. Discutons avec le chauffeur et sa femme à la fin du trajet pour Damas. Ils nous ramènent très gentiment au plus près de notre appartement.

Nous sentons très faibles mais passons tout de même par une ou deux épiceries avant de rentrer. Achetons un poulet rôti avec un sauce à l'ail, du riz, des bananes, du pain et du coca, histoire de manger quelque chose de consistant car nous soupçonnons que notre état est dû au régime frugal et peu équilibré de ces derniers jours.

Après le repas qui a du mal à passer, nous ne parvenons qu'à comater devant la télé. Nous nous couchons, mais je passerai la nuit à me vider. Gastro. Je ne parviens pas à dormir. Pendant la nuit, I. me trouve alongé dans la cuisine à même le sol à la recherche d'un peu d'air frais.

 

Lundi

Je suis ko. Courbatures terribles dans les jambes. Impossible d'avaler quoique ce soit même de l'eau. Complétement déshydraté. Réfléchissons à une solution. Prise de rendez-vous chez le toubib à 20h. Impossible de s'y rendre avant. Sinon en dernière limite, on pense à l'hopital mais il se tient assez loin. Rien que l'idée de monter dans un taxi, vu mon état, me donne la nausée. I. n'est pas très en forme non plus mais plus que moi, heureusement. Elle téléphone à H. qui vient avec la petite et nous ramène quelques médicaments.

Je parviens à boire un thé et à manger un morceau de banane. Je dors des heures. Pendant ce temps, dans le salon à côté, H. et I. discutent toutes les deux tandis que la petite joue tranquillement sur le balcon. Je les entends chaque fois que je m'éveille. Je baigne dans une ambiance semi onirique qui atténue un peu le côté morbide de mon état. Et cette proximité sympathique me renvoie à des impressions rassurantes issues de l'enfance.

En fin de journée, je me sens un peu mieux. Je décide de me passer de médecin. I. et moi comatons le reste de la journée. Je parviens toutefois à terminer toutefois mon livre.

 

Mardi

Nous ne sortons pas. Il fait un chaleur terrible. Nous sommes crevés. Je passe la journée à dormir, lire le Coran, et le soir nous regardons une fois de plus la télé.

21:00 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : syrie, vacances, moyen orient, damas

18/03/2009

Syrie (notes) V

Vendredi

Nous sommes un peu fatigués de notre périple de la veille. Il fait encore extrêmement chaud. Partout retentissent, se mèlent les appels à la prière. Ne bougeons pas avant 17h. Marche vers Place Al Yarkoum, puis Al Midan. Quartier pourvu de nombreux stands de shawarma. Nous commençons à avoir faim. Partageons Shawarma et Khebbe. Buvons Moser Halib. Remontons vers le nord par Abou Bakr as Siddiq, puis arrivée Place des Omeyades. Redescendons et passons devant le Musée National d'archéologie. Petite place. Nous bifurquons et nous perdons un peu. Le soir s'installe et la fatigue nous gagne. Nous avons rendez-vous vers 21h devant chez nous pour attraper le taxi qui nous emmènera chez H. Faisons courses en chemin dans plusieurs épiceries. Beaucoup sont fermées compte tenu du jour (le vendredi dans les pays musulmans est l'équivalent du dimanche chez nous). Au retour, nous trouvons le taxi qui nous attend déjà. Nous montons avec les courses. J'engloutis en chemin mon coca parfum myrtille ce qui nécessite une certaine habileté compte tenu de la conduite de notre chauffeur (secousses, arrêts brusques,...). A l'arrivée le taxi nous comptera très cher. I. appelle H. pour lui demander si le tarif proposé est normal. Elle finit par passer le portable au chauffeur qui nous compte finalement 150 livres de moins. Passons très bonne soirée puis retour en taxi vers minuit et demie. Partout dans les rues, de la vie, de l'activité. Tous mes repères sont faussés. Rien n'est pareil ici. Tout échappe à nos critères habituels. Je le réalise pleinement.

 

Samedi

Samedi, c'est ici aussi « samedi ». Du monde partout. Nous ne sommes pas très en forme (je traine une sorte de rhume), un peu dans le gaz. Nous nous refaisons la Vieille ville de long en large. Surtout le côté ouest, espérant tomber sur le quartier juif que nous n'avons pas encore arpenté. Puis marchons vers la Place Merjeh. Le parc est ouvert. Etendue d'herbe. Juste à côté, grande artère. Les amateurs de sensations fortes et les athlètes traversent sans doute directement en sprintant. Nous préfèrons emprunter, comme la plupart des gens, la passerelle pour traverser. Présence de nombreuses animaleries. On y trouve beaucoup d'oiseaux, des poussins, mais aussi des rongeurs, des poissons et même des serpents.

Attrapons un taxi pour admirer la vue du haut du Mont Kassioun. En cette fin d'après-midi, la lumière sera sans doute idéale. Le conducteur du taxi est un jeune type sympa au visage un peu abimé. Il tente de discuter un peu tout en pilotant un engin poussif que la très forte côte met visiblement à rude épreuve.

En haut, pas mal de gens se sont installés. Petite activité commerciale aussi. De petites camionnettes proposent du tabac, du coca ou même de fumer le narguilé. On aperçoit également de petits stands, et des enfants font office de vendeurs ambulants. Pour la première fois, nous nous retrouvons en présence de mendiants. La mendicité est-elle interdite en ville? Nous profitons de la vue. Sur la droite, se tient un peu plus bas la résidence présidentielle. Ensemble de bâtiments carrés couleur sable et abri anti atomique.

 

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La nuit tombe. La ville est encore plus magnifique. Finissons par repartir. Un taxi vient de lui-même nous trouver.

Rentrés à la maison, nous mangeons les restes du délicieux repas de la veille que H. nous a emballer dans de petits boîtes plastiques. C'est « Byzance »! Enfin nous ingurgitons ce soir autre chose que du pain et des olives. En avalant des hectolitres de soda syrien, je me dis qu'il vaudrait mieux pour moi boire davantage d'eau plate sous peine de connaître rapidemment l'embonpoint des mâles syriens post trentenaires.

Nous passons la soirée à zapper. Regardons pubs et émissions. Très instructif socialement parlant. Clips à la sensualité sage relatant au moyen de scènettes très stéréotypées les déboires amoureux de tel ou tel, victime d'une belle sans coeur. Les filles quand à elles y ont des velléités d'émancipation. Spectacles de chant plus traditionnel. Emission scientifique où un type à lunettes (gage de sérieux et cérébralité) tente de démontrer la présence de théories et de schémas scientifiques dans les sourates du Coran.

Regardons aussi les infos marocaines, lesquelles à cette heure présentent pour nous l'avantage non négligeable d'être en français. Contenu : Union pour la Méditerranéen, inaugurations nombreuses et zélées de Mohammad 6. « ça se développe... ». Sachez-le, le Maroc se développe au cas où vous ne l'auriez pas encore compris. Le souverain est partout (comme chez nous depuis 2007). Sinon, je réalise durant cette soirée que je me familiarise un peu avec l'arabe. Je connais peu de mots mais je comprends vaguement la déduction aidant le sens de certaines phrases.

Je finis le soirée en reprenant mon bouquin sur la querelle de l'arianisme. J'y apprends que Constance est mort de malaria. Apparition de Julien le faux chrétien qui se prenait pour Alexandre le Grand. Les figures se succèdent. Tout ce petit monde tombe comme des mouches. Dormir...

14:01 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : syrie, vacances, moyen orient, damas

21/08/2008

Syrie (notes) IV

 

Journée très chaude. Repos. Vais faire les courses seul pour la première fois fort de mes quelques mots arabes révisés le midi. Petit tour du quartier. Aujourd'hui personne ou presque ne semble faire attention à moi. Je suis un homme seul. Ici, la plupart du temps, les gens se déplacent soit seul, soit en famille, soit avec des personnes de même sexe, mais des couples jeunes se promenant dans les rues on en voit très rarement. Epicier très sympathique m'aide en m'indiquant le nom arabe de certains produits. Communication au moyen de quelques mots et de signes. Je rentre content et serein.

Repas comme presque chaque jour constitué d'olives, de fromage et de pain, plus des litres de thé. J'ai également acheté un lait jaune aromitisé « banane ». Goût de bonbons Haribot pas désagréable pour qui est sensible au charme du chimique. I. ne semble pas convaincue et jette un regard soupçonneux au liquide.

Nous ne décollons pas avant cinq heures. Grande balade. Bab Touba. Passés par quartier arménien. Sortis à côté de la Grande Mosquée. Souk : à certains endroits, vêtements improbables : dessous suspendus en hauteur qui feraient rougir une occidentale – avec fourrure rouge, perles, string avec fente stratégiquement placée. Bijoux très très imposants, etc... Parfum d'épices que nous adorons. Nous arrêtons pour boire un jus de mûre. Marchons des heures. Le soir commence à s'installer. Arrivons dans quartier moderne. Grande banque commerciale, etc... Des boutiques partout. Quartiers toujours très animés. Néons, mosquées magnifiques illuminées. Circulation comme toujours incroyable. Il faut se jeter littéralement sous les voitures par traverser.

Nuit. Redescendons avec les gens par grand axe. Par ici, plein de boutiques de plantes et de fleuristes. Nous sentons en phase avec ce qui nous entoure. J'ai pour la première fois l'impression d'être damascène. Plus à l'aise qu'à Paris. Finissons par rentrer par le quartier chrétien Tournons en tout sens. Nous perdons un peu. D'une ruelle à l'autre contraste saisissant : dans certaines nous ne rencontrons personne, dans d'autres nous nous retrouvons soudain dans la foule. Quartier « branché », mais aussi beaucoup de musulmans qui se rendent à la salle de prière. Ereintés nous finissons par trouver Bab Sharki, la bonne sortie. Longeons Ibn Assaker. Sur la place Hassan Al Kharrat, des gens de tout âge sont installés paisiblement. Aux heures fraiches toute parcelle d'herbe se trouve investie surtout une fois la nuit installée.

Rentrons, mangeons. Elaborons planning pour la suite du séjour. Puis lecture du bouquin de Rubenstein sur l'arianisme et la trinité jusqu'à une heure du mat'. L'affreux Athanase et ses combines mafieuses pour renverser ses adversaires théologiques. La mort mystérieuse d'Arius,...

Nous couchons. Regarde mon ange dormir. Silencieusement je pleure à ses côtés. Je suis heureux et mon coeur me donne l'impression de déborder.

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17:24 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : syrie, voyage, moyen-orient, damas, pays arabes

11/08/2008

Syrie (notes) III

 

Lever 10h30. Déjeuner comme dîner de la veille. En fond, radios du coin.

Promenade direction Bab Sharqi. Visite de la Chapelle St Paul au niveau de Bab Kaysan. Sans grand intérêt. Puis quartien chrétien, arménien. Mais tout est fermé. Peu de gens dehors. Il est encore trop tôt. Finissons par atterrir à côté de la Grande Mosquée (Omeyyades). Allons en direction de la Citadelle puis passons par un marché couvert (quartier juif ?). Nous retombons sur le souk Hamidieh, puis à nouveau sur la Grande Mosquée. Nous avons terriblement soif. Retournons au même endroit que la veille pour déguster notre pinte de lait à la banane (commençons à prendre des habitudes déjà). Puis nous retournons par où nous sommes venus. Le coin s'anime. Beaucoup de jeunes « branchés » chrétiens. Beaucoup de circulation aussi. Prenons quelques photos. Retour à l'appartement à pied agréable. Presque arrivés, en passant sur la Place Hassan Al Kharrat par les petits chemins longeant le mur d'enceinte de la Vieille ville bordés de gazon nous nous faisons aspergés d'eau fraiche par les jets tournoyants.

A l'appartement, Isa se prépare pour ressortir en ville tandis que je révise mes quelques mots d'arabe. Nous avons beaucoup marché et nous sommes un peu fatigués. Sortons à 22h00 pour trouver un resto près du grand hôtel Sham Palace. Prenons taxi. Sur Ibn Assaker nous entendons quelqu'un souffler comme un désespéré dans une trompette. Le son provient visiblement du véhicule qui nous précéde. Quand le taxi arrive à son niveau, nous apercevons le chauffeur du véhicule affairé avec sa trompette tout en conduisant. Rires. Le chauffeur de taxi plaisante un peu avec lui. Nous avons mal indiqué la destination (mauvaise prononciation) le taxi ne nous emmène pas directement au bon endroit. Une fois à pied nous mettons un temps infini à trouver le resto. Les rues sont peu éclairées. Quartier moderne très animé et bruyant. A proximité, très fort, de la musique pour un mariage. Demandons partout notre chemin mais nous peinons énormément à nous faire comprendre.

Nous arrivons enfin au resto. Le patron (très gominé) prend la commande. Système très hiérarchisé. Les serveurs ne font qu'amener les plats et débarrasser. Seul le patron prend les commandes et encaisse (constantes que nous retrouverons dans pratiquement tous les restaurants dans lesquels nous nous rendrons). Mangeons salade, kebbab. Buvons jus de fruit. Bon, mais je suis très las et je ne profite pas vraiment du repas. J'ai envie de rentrer. Demandons addition. Erreur sur la note. Un serveur va chercher le patron qui refait le détail et rectifie. Lors du paiement il sort une énorme liasse de billets de sa poche et nous rend la monnaie. Partons en taxi. Il n'a pas de compteur. Nous devrons donc évaluer le coût du trajet. Le chauffeur semble éprouver une certaine difficulté à nous conduire à l'appartement. Enfin arrivés il nous demande un prix trop élevé. I. est obligée de négocier en arabe. Rentrons épuisés et très las.

 

 

23:51 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : moyen-orient, voyage, voyages, pays arabes, syrie, damas

Syrie (notes) II

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Dormi jusqu'à 12H30. Bougé à 15 heures. Nous partons à pied visiter le Souk Hamidieh et la Mosquée des Omeyyades mais nous nous trompons de direction. Prenons le taxi. Visite du souk. Nous buvons des litres de soda, lait à la banane. Discussion avec type du lieu où nous nous arrêtons pour boire. Arrivés à la Mosquée des O. nous passons sur le côté gauche pour payer deux entrées et prendre une tenue pour I. : seuls les damascènes peuvent entrer gratuitement et une tenue à capuche kaki intégrale est prêtée aux femmes non voilées. La mosquée est un lieu extrêment agréable. Grande place centrale couverte de dalles de marbre de l'époque romaine. Lieu de vie. Des enfants jouent. Les gens s'y reposent et discutent. Nous y restons des heures. Sépulcre imposant d'un personnage indéterminé. De chaque côté de la structure qui protège le sépulcre, les gens glissent de l'argent par de petites ouvertures prévues à cet effet. Dans mosquée, un côté pour les hommes, un côté pour les femmes ; le tout séparé par un cordon.

I. discute avec une petite fille en anglais. Sur les recommandations d'une dame assise un peu plus loin avec d'autres femmes (qui doit être la mère de la petite fille) I. n'utilise que l'anglais. La petite fille très mignonne pose plein de questions I. La nuit commence à tomber. Nous prenons un certain nombre de photos. Un homme vient nous informer qu'il faut partir. En sortant, la petite donne un petit foulard à I. très émue.

Re traversons le souk Amidieh. Tentons de revenir à pied. La nuit est tombée et les rues sont peu éclairées. Finissons par arriver à proximité d'une sorte de périphérique. Quelques marchands se tiennent là. Leur demandons Ibn Assaker (grande artère où nous logeons). Difficultés à nous faire comprendre. Un des marchands nous fait signe de le suivre. Nous remontons et il nous fait prendre un « service » (mini bus blanc à peine plus grand qu'un « espace »pouvant contenir une douzaine de personnes). Des passagers nous aident pour le paiement. Fonctionnement un peu collectif : les passagers participent à la collecte de l'argent à remettre au chauffeur en paiement du trajet. On nous prévient lorsque nous arrivons à proximité d'Ibn Assaker.

Puis courses dans les petites épiceries des environs. Il n'y a ici nulle trace de supermarchés. Nous achetons des olives, du lait, du pain, de l'eau, de la confiture, des litres de sodas type coca et canada dry aux parfums inédits et improbables ainsi que différentes sortes de fromage. Petit détour à pied puis rentrons manger. Lisons un peu sur la terrasse (nous sommes au second) pour profiter de l'ambiance encore très animée à cette heure pourtant tardive. Nous sommes fatigués et légérement tendus.

07:40 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : syrie, voyage, voyages, moyen-orient, damas

07/08/2008

Syrie (notes)

Vol très matinal. Une escale à Istanbul. Légère appréhension de mon côté : n'ai pris l'avion que deux fois dans ma vie et cela remonte à il y a plus de 10 ans. A Istanbul, après avoir traversé de long en large l'aéroport (très grand et très moderne), nous nous installons dans zone d'attente et passons le temps en regardant les badauds. Au deuxième vol, sensation de routine ; comme prendre le train. Le vol me paraît très court.

Arrivée. L'avion semble atterrir au milieu de nulle part. Tout autour, paysage aride et quasi lunaire. A la descente, il fait très chaud avec beaucoup de vent. Impression de se trouver dans le souffle d'un sèche-cheveux géant. Un petit bus un peu déglingué vient nous prendre pour nous conduire de l'avion à l'aéroport, petit batiment à la froide architecture soviètique. L'intérieur ressemble à une gare de province. Petit hall plein de monde. Au fonds on aperçoit trois cabanons au dessus desquels pendouillent des cables électriques. Pendant une heure il ne se passe rien. Nous attendons. Personne ne semble surpris ni impatient. L'habitude de toute évidence. Un militaire ou deux, moustachus et bedonnants, à la démarche de cowboys longent les files et regardent les gens. Les files progressivement constituées semblent en proie à un phénomène d'érosion. En apparence, rien ne se passe mais nous nous trouvons lentement avancer vers les cabanons. Lorsque vient notre tour, mini interrogatoire en anglais : votre profession ? L'adresse des personnes chez lesquelles vous vous rendez ? Le type fait mine de ne pas trouver le visa dans le passeport et me le tend. Puis enfin coup de tampon libérateur. Représentation du passeport un mètre plus loin. De loin, à la porte de sortie, des gens font de grands signes aux personnes qu'ils attendent. Nous récupérons nos bagages dans le tas jetés par terre en vrac. On nous laisse passer sans contrôle des bagages. H. et la petite (qui ressemble, je le constate à ce moment, à I.) nous attentent à la fameuse porte.

Nous prenons tous les quatre le taxi. H. nous explique que le taxi n'est pas en règle (pas de licence) La licence se révélant d'un coût très élevé un certain nombre de chauffeurs de taxi s'en passent ; le véhicule se présente donc comme une voiture individuelle. Problème : nous nous faisons arrêter sur un rond-point cinq minutes plus tard. Nos deux têtes d'occidentaux à l'arrière du véhicule auront éveillé la méfiance de la police. Deux types en uniforme, assez massifs et bedonnants, font signe au chauffeur de se ranger sur le bas côté. S'en suit un échange relativement calme qui dure près d'un quart d'heure entre le chauffeur et les deux représentants de l'ordre, avec questions posées à H. qui présente le chauffeur comme un de ses amis et va jusqu'à leur tendre sa carte d'enseignante en université. Le chauffeur finit par être sommé de retourner à l'aéroport nous y re déposer afin que nous reprenions un vrai taxi. A proximité de Damas, en périphérie, nous apercevons des constructions dans les tons ocres et gris constituées de parpaings empilés et surmontées de paraboles. Circulation extrêmement chaotique, quasi anarchique.

L'appartement. Très grand. La propriètaire est une sympathique dame de 70 ans d'allure jeune et décontractée à qui on en donnerait 20 de moins. H. nous présente à elle, discute un peu et établit avec elle les conditions de notre hébergement.

La décoration de l'appartement est très kitsch. Vieilles photos (portraits, mariage,...), gros rideaux dans le style drapé. Meubles seventies. Etagères supportant quelques livres en arabe. Quelques bibelots et vases dans le style chinois. Petite cuisine avec grande baie vitrée pourvue de cactus imposants. Grand ventilateur au plafond.

Une fois la dame partie, nous décidons, escortés par H., d'aller changer de l'argent à la grande banque. Mais lorsque le taxi nous y dépose, l'établissement est fermé. nous effectuons le change à côté dans un petit magasin.

Nous repartons en taxi en direction de l'appartement de H. situé à New Cham (Le Nouveau Damas). Quartier moderne type banlieue en haut d'un ensemble de collines. Passons soirée agréable chez H. Soda, délicieux couscous, discussion, prise de photos, télé en fonds pour la petite. Sommes très fatigués. Au retour, le taxi tente de nous gruger. Puis longue nuit.

17:03 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : voyage, damas, syrie, moyen orient, pays arabes