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11/03/2012

Maroc 28 février. Tanger.

Décollage à 8h30. Nous traversons un plafond de nuages. Impression de tout laisser derrière moi. Puis à l'horizontale, enfin. Belle lumière rose. Nous planons au dessus d'un tapis de nuages  granuleux extrêmement compact. Après avoir pris le petit déjeuner servi par la compagnie et potassé la brochure laissée à notre disposition, je constate que nous survolons déjà l'Espagne. Files d'éoliennes le long des crêtes des massifs espagnoles. L'altitude est maintenant supérieure à 10 000 km et la température de -74° à l'extérieur. Traversée du Détroit de Gibraltar très rapide. Nous sommes presque arrivés. Nous survolons la côte à si basse altitude que j'ai l'impression que nous allons atterrir sur la plage.


A l'aéroport de Tanger. Change. A la sortie, F. nous attend. C'est un jeune marocain très sympathique d'une trentaine d'années environ à la voix rauque de grand fumeur, habillé en jeans et blouson de cuir avec sur la tête une casquette à l'ancienne qu'il porte la visière au raz des yeux ce qui lui donne un peu des airs de macho italien ou espagnol. Il nous invite à monter à l'arrière de sa minuscule fourgonnette rouge. L'intérieur vaut le détour : nous sommes assis sur une banquette à ressort avec un tapis marocain à nos pieds. A l'avant, le tableau de bord est recouvert d'une sorte de fourrure ; aux poignées entourées de bandanas rouges de chaque côté du pare-brise sont attachés des schtrompfs en pluche. J'observe la vie tout autour. Impression de liberté dans les attitudes et de vitalité. Les gens traversent les rues à l'arrache, les banquettes arrières des taxis couleur sable supportent quatre personnes, de jeunes gars sans casques slaloment en mobylettes entre les voitures et les gens.
Durant le trajet, F. hèle plusieurs personnes à travers la portière ; il s'arrête parfois cinq secondes pour leur parler. La taille de son véhicule lui permet de circuler dans les artères de la médina et nous arrivons très rapidement chez nos hôtes.

A. et J., couple d'américains d'une cinquantaine d'années installés à Tanger sont très décontractés et sympathiques, un peu baba mais en plus chic et sobre. Ils nous font visiter une petite chambre au rez de chaussée dans les tons vert émeraude très haute de plafond et recouverte par endroits de mosaïque. Une fenêtre avec vitraux de couleur protégée par un grillage ouvragé donne sur la rue et sur une fontaine. L'ensemble est à la fois très joli, typique et intime. Nous visitons ensuite le reste de la maison toute en hauteur. Les escaliers recouverts de mosaïque sur très étroits et très raides. A un étage, un coin cuisine ; à un autre, un coin salon, etc. Nous finissons par arriver sur une petit terrasse pourvue d'un coin véranda qui offre une vision panoramique de toute la médina. On nous y installe pour prendre le thé tranquillement. Nous y restons une petit heure à jouir de la perspective offerte par l'endroit. Pas très loin, la mer. Tout autour de nous, une juxtaposition de petites maisons blanches avec terrasses et fouillis de paraboles et d'antennes télé. J. remonte nous voir et nous propose de faire le tour du quartier pour nos donner quelques points de repères dans ce labyrinthe et quelques bonnes adresses. Durant une demie heure,    A. nous explique un certain nombre de choses et nous donne des repères visuels ; son attitude et celle de J. et les relations très amicales qu'ils semblent entretenir tous deux avec les gens du quartier témoignent de leur intégration dans la vie de la médina. Arrivés à la grande place, après nous avoir demandé si nous nous sentions capables de retrouver notre chemin, ils nous laissent profiter de la ville.

Parmi les adresses qu'ils nous ont indiquées, nous nous rabattons sur une toute petite gargote sans enseigne. Une femme aux yeux clairs assez jeune et très gironde nous montre, exposés sur le comptoir derrière lequel elle se tient, les différents tajines du jour. Nous nous installons sur l'unique table placée au milieu de la petite salle et recouverte d'une toile cirée. Le long des murs autour des supports permettent aussi à quelques personnes de se poser pour prendre leur repas. Je contemple un court instant le gros frigidaire sixties vert et un peu délabré placé à côté de l'entrée. Deux ou trois matous rentrent et sortent régulièrement, inspectant les lieux à chaque passage dans l'espoir de glaner quelques bricoles. Comme nos voisins de table, nous savourons notre tajine tout en jetant régulièrement un œil sur la petite télévision placée tout en hauteur qui diffuse les informations du jour. Les sujets internationaux abordés de même que la manière de les présenter donnent quelque chose de visiblement similaire à ce que nous connaissons ; sans connaître la langue nous comprenons en substance ce qui se dit dans la lucarne.

Une fois sortis, nous décidons d'aller sur la petite place plus bas prendre le thé à l'adresse conseillée par J. même si l'endroit n'a à première vue  rien de bien réjouissant comme elle nous en a avertis. Une minuscule salle donne directement sur la rue et en terrasse, assis dans deux chaises en plastique en triste état, deux vieux marocains en tenues traditionnelles et à l'air rugueux fument le kif au moyen de longues pipes sculptées. A l'intérieur quelques tables le long d'un mur, au fond on discute et on fume visiblement la même chose qu'en terrasse. Sur le côté, un homme d'une quarantaine d'années affairé derrière de petits réchauds à gaz rudimentaires nous souhaite la bienvenue. Il se rappelle de nous, il nous a vu passer tout à l'heure avec A. et J. qui l'ont salué de loin. I. prend un grand café au lait et moi un thé à la menthe. Un vieux monsieur en djellaba se tient assis à la table juste devant nous. Le patron du café change de chaîne sur la petite télé placée en hauteur à l'entrée ; il met une chaîne européenne. C'est une marque d'attention à notre endroit. I. me fait remarquer à juste titre qu'on imagine assez mal la chose transposée chez nous : imaginez un marocain en djellaba ne parlant presque pas français qui se pointerait dans le micro troquet d'une petite ville  française, et à qui on mettrait Al Jazira par courtoisie. Surréaliste. Sur l'écran des mannequins aux tenues on ne peut plus minimalistes se déhanchent de manière très marquée en parcourant un long podium. Le vieux homme devant nous trouve le spectacle visiblement plaisant et très amusant. Il nous prend à témoin de ce qu'il voit avec force gestes, se cache les yeux, puis fait mine de repousser des deux mains les images en riant et en détournant la tête. S'en est trop pour lui, il n'a plus l'âge. Nous rions avec lui de la situation. De temps à autre, en arrière fond, un chant de coq sort de nulle part. Puis le vieux homme finit par se lever une fois bu son thé et nous salue d' un « aureuvoir » en nous souriant.

Une fois sortis, nous déambulons au hasard des ruelles. Nous finissons par atterrir dans un marché proposant viande et poissons. Ici, moi qui aimerais être végétarien si je n'aimais pas tant la viande, je suis mis à rude épreuve. Tout autour de moi des chapelets de viscères qui pendouillent, des pieds de moutons fraîchement découpés entreposés par terre ; ici et là des flaques de sang séché, des poulets démembrés accrochés un peu partout ; un peu plus loin, un type qui grattent un patte de mouton, et puis l'odeur, et cette énorme tête de bœuf renversée sur un comptoir et partiellement dépiautée et puis ces quelques mouches qui voltent autour de tout ça. Est-ce dû à la traversée de cette partie ? mais la salle dédiée à la poissonnerie, avec ses énormes tas de poissons jetés les uns sur les autres sans glace pour les conserver, ne m'inspire guère plus. L'exotisme peut résider aussi dans ce genre de choses.
Repartons, espérant grâce aux conseils avisés de A. retrouver rapidement notre logement. Après quelques allers et venues et bien des hésitations, nous parvenons enfin à bon port.

Sieste. Au dehors la rue comme si nous y étions. Mais je suis si fatigué qu'une fois endormi le muezzin ne parvient même pas à me réveiller. Trois quarts d'heure plus tard, j'ouvre les yeux. Au dehors des petits sont en train de jouer à proximité de la fontaine. Beaucoup de rires. Des bruits d'eau. Un chat qui s'est réfugié sur l'appui de notre fenêtre se fait asperger d'eau ; les gouttes viennent s'écraser sur les vitraux et je vois la silhouette du chat qui se recroqueville.

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Sortons nous promener le long des remparts donnant sur la mer. Le temps est très agréable. Autour de nous beaucoup d'enfants et de vie. Puis un homme en djellaba qui sort de chez lui nous salue et nous indique que nous sommes dans un quartier musulman et ancien. « Rien de moderne par ici. Quartier musulman. Les Falaises... ».
Nous finissons par atterrir sur une petite place pourvue de quelques bancs en bois un peu déglingués. Autour de nous, des mères avec les enfants et des jeunes qui discutent. Puis repartons et nous retrouvons sur la place du Grand Socco où A. et J. nous avaient laissés en fin de matinée. Plus haut, la partie moderne de la ville. Beaucoup d'animation en ce début de soirée.


Très fatigués par notre longue marche et par le voyage, nous décidons de retourner nous reposer à la maison d'hôte. Il nous faut retrouver notre chemin dans le méandre des ruelles. Un vieux homme nous entreprend et veux nous montrer une boutique « pour le plaisir des yeux seulement. Pas pour acheter. ». Pensant qu'il s'agit de sa boutique, nous nous montrons courtois et acceptons de le suivre. Il nous mène jusqu'à une boutique d'herboriste et nous présente avant de s'éclipser à un homme d'une trentaine d'années qui se lance dans un exposé de son activité. L'homme nous fait sentir différents produits et nous en explique les vertus. J'écoute distraitement et mes yeux parcourent les longues rangées de gros bocaux exposés sur les étagères. Il finit par nous laisser « regarder » pour accueillir deux autres personnes (des locaux cette fois). Nous restons le temps minimum par politesse, puis ressortons en le saluant. « A bientôt. N'hésitez pas à repasser ». Une fois dans la rue, le vieux homme en djellaba nous attend et après quelques pas nous demande quelques dirhams. Nous refusons poliment. Après avoir fait un crochet par un petite épicerie, nous rentrons et passons une partie de la soirée sur la terrasse à profiter de la vue tout en mangeant de la vache-qui-rit sur du pain et en buvant un soda à la pomme très sucré.

15:26 Écrit par Neothene dans Où je vis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maroc, vacances, voyage, carnet, maghreb